Au japon, des zones six fois plus contaminées que Tchernobyl sont encore habitées. En août 2011, le professeur Christopher Busby, un scientifique britannique spécialiste de la radioprotection procéde à des mesures à Tokyo et trouve à certains endroits des concentrations en radionucléides aussi élevées que celles observées dans la zone d’exclusion de Tchernobyl ! Les Japonais témoignent que de multiples endroits non-évacués de la préfecture de Fukushima confirment l'exactitude de ces mesures. Deux semaines après le début de la catastrophe, suite à la découverte de concentrations de cesium 137 dans le sol du village de Iitate (à quarante kilomètres de la centrale), le Professeur Hiroaki Koide (de l’Université de Kyoto), a rappelé qu’en 1986 on avait évacué rapidement tous les endroits où la contamination dépassait 550 000 becquerels par mètre carré. À Iitate, ces concentrations ont atteint jusqu’à 3 260 000 becquerels par mètre carré pour le cesium 137 !
> Interviewée à son retour du japon sur "20 minutes.fr", Corinne Lepage confirme les informations sur la l'incapacité de Tepco ((Tokyo Electric Power Company, l'EdF japonais propriétaire de la centrale de Fukushima) et du gouvernement japonais à maîtriser la situation : "Personne ne peut s’approcher de la centrale, mais je suis allée dans la préfecture de Fukushima. Ce que m’ont dit les autorités locales, c’est que la catastrophe est toujours en cours, on ne maîtrise rien. On sait que trois coeurs de réacteurs ont fondu (depuis le mois de mai) mais on ne sait pas jusqu’où ils se sont enfoncés dans le sol. Il y a des stocks de boues contaminées dont personne ne sait quoi faire et le traitement de l’eau radioactive est très difficile. On ne sait pas décontaminer à une telle échelle et personne ne veut payer pour reloger les familles. Nous sommes face à une industrie du nucléaire qui ne peut pas s'assurer car le coût de ses accidents est démesuré."
> Autre sujet de préoccupation, le choix du gouvernement japonais d'incinérer le débris contaminés (matériaux de construction, arbres, gazon, paille de riz) provoquera une dispersion du césium radioactif sur de vastes zones du pays qui restaient encore propres, mais aussi à travers l'océan Pacifique, et jusqu'en Amérique du Nord (voire au delà). Il semble bien que le gouvernement n'a pas saisi la gravité de la contamination au Japon, et n'a pas conçu un plan cohérent pour faire face à la catastrophe et assainir l'environnement. Faute d'un tel plan la contamination continuera de s'étendre à travers le pays et dans le reste du monde, aggravant encore le problème et augmentant les pertes humaines, la contamination et les coûts, de manière incalculable.
> Le professeur Kodama, Directeur du Centre des Radioisotopes de l'Université de Tokyo a déclaré le 27 juillet : "en utilisant la base de connaissance du Centre des Radioisotopes, nous avons calculé que selon les données thermiques, c'est 29,6 fois la quantité libérée par la bombe nucléaire sur Hiroshima. En équivalent uranium, c'est 20 bombes d'Hiroshima" (lien pour la video, en bas de page).
Arnold Gundersen de la société Fairewinds (ingénieur et ancien cadre dirigeant de l'industrie nucléaire) s'exprime dans une vidéo. Ce spécialiste décrit le processus de contamination du Japon lors de l'accident de Fukushima. Il déclare que la zone de sécurité de vingt kilomètres était dès le début totalement ridicule. Mais plus important, il explique comment un phénomène connu sous le nom de "black rain" (la pluie noire) a rendu possible la contamination d'une région beaucoup plus vaste, et bien au-delà de Tokyo ! En effet, les territoires contaminés ne se limitent pas à la zone d’exclusion décidée par le gouvernement. Pour plusieurs centaines de milliers de Japonais, la situation sanitaire est dramatique, certains secteurs habités étant plus pollués que des zones interdites à Tchernobyl. Et malgré ces faits alarmants, les médias japonais n'osent pas informer le public. Les médias français ne font pas mieux non plus, subissent-ils des pressions du lobby nucléaire et du gouvernement ?
> De nouvelles données confirment l'analyse de Fairwinds sur une contamination du japon au reste du monde. 23 septembre 2011.
Trois scientifiques de l'Université de San Diego (Californie) viennent de publier des mesures qui confirment une précédente analyse de Fairewinds d'Avril dernier. Celle-ci indiquait que le cœur du réacteur de Fukushima Daiichi s'était allumé, puis éteint, bien après que Tepco ait affirmé l'avoir complètement arrêté. Cette réaction a continué à contaminer l'environnement et la haute atmosphère par de très importantes doses de radioactivité
Fairewinds conteste les rapports officiels affirmant que toutes les piscines de combustible usagé avaient passé le séisme sans aucun dommage. En réalité, le plutonium trouvé à plus d'un kilomètre et demi du site proviendrait de l'intérieur même des réacteurs. Si cette information est confirmée, cela signifierait que le système de confinement de la centrale a été détruit et que des débris ont été projetés aux alentours. Pour Fairewinds cette défaillance du système de confinement rend obligatoire un ré-examen complet de toute la conception du système de confinement de l'ensemble des réacteurs américains, ainsi que la garantie par l'industrie nucléaire que ce système est capable de contenir la radioactivité en cas d'accident nucléaire... Fairewinds conclut que les preuves examinées à ce jour confirment sa première analyse : c'est la détonation qui a eu lieu dans la piscine de combustible usagé n°3 qui est la source du plutonium trouvé autour du site....
> Un des travaux de Tepco pour contenir l’accident nucléaire est la prévention de la contamination de l'eau de mer. Pour cela, l’exploitant de la centrale nucléaire de Fukushima Daiichi doit construire un mur en acier qui empêchera l'eau radioactive de s'écouler dans l’océan. Ainsi, Tepco reconnaît implicitement que l’eau contaminée des sous-sols s'écoule actuellement dans la mer, ce qui confirme les analyses géologiques : les couches aquifères du plateau d’Abukuma se dirigent vers l'océan pacifique. La vitesse de déplacement des eaux souterraines est lente (quelques mètres par semaine), mais l’eau radioactive va continuer à s'écouler régulièrement dans la mer durant au moins deux ans, date à laquelle la construction du barrage est censée être terminée. Mais l'eau peut aussi contourner le dispositif (dont on sait qu'il est construit sur une faille sismique, comme la centrale). L'océan pacifique va continuer à subir une pollution radioactive qui va contaminer l’ensemble des mers de la planète durant des dizaines d'années...
> Quel avenir pour le nucléaire au Japon ? Quarante trois réacteurs sont maintenant à l’arrêt, soit plus de 80 % du parc. Dans leur grande majorité, les autorités locales ne souhaitent pas les voir redémarrer. Par ailleurs, quatorze nouvelles failles sismiques ont été découvertes à proximité de sites nucléaires japonais, un argument de poids, pour faire évoluer la politique atomique du gouvernement. En juillet dernier, le Premier Ministre Naoto Kan avait plaidé pour un Japon dénucléarisé et pour le développement des énergies renouvelables. Mais, si le nouveau gouvernement n’envisage pas la construction de nouvelles centrales nucléaires, il souhaite le redémarrage des unités actuellement à l’arrêt ! Il semble qu’un changement de politique énergétique se heurte à une forte résistance du lobby nucléaire japonais, qui malgré la catastrophe et le scandale conserve une forte influence sur le gouvernement. Ainsi en juin, à la conférence climatique de Bonn, les représentants du Japon s’étaient montrés d'ardents défenseurs de l’inclusion du nucléaire dans le "Mécanisme de Développement Propre" (un programme pour réduire les émissions dans des pays en développement, financées par les pays occidentaux).
> Mais les japonais réagissent, en premier lieu dans les zones sinistrées, mais aussi dans le reste du pays. Organisés en comités, les habitants de Tokyo tiennent désormais des manifestations importantes contre le nucléaire comme on n'en avait jamais vu jusque-là. Soixante mille personnes, parmi lesquelles Kenzaburo Oe (prix Nobel de littérature), ont convergé lundi 19 septembre – jour férié – vers les parc Meiji, attaquant dans leurs slogans un gouvernement qui pour eux ne cesse de mentir, et n’aurait nullement l’intention de changer de cap en matière énergétique. En plus de ces manifestations qui se multiplient, il faut compter les réseaux sociaux, les sites Internet qui taillent des croupières aux médias traditionnels. (extrait d'un article de Christian Kessler, Le Monde diplomatique).
> Pendant ce temps, on apprend qu'à la centrale de Belleville sur Loire les conditions pour un accident nucléaire existent bel et bien. Inondation en salle des machines, un employé témoigne...
> Photos, de haut en bas. Champ d'épinards contaminés. Manifestation contre Tepco à Tokyo. Corinne Lepage. Une japonaise anti-nucléaire. Arnold Gundersen. le professeur Kodama devant les députés japonais. Contrôle de radiations.
> Sources :
Fairewinds Associates - http://fairewinds.com/content/new-data-supports-previous-fairewinds-analysis-contamination-spreads-japan-and-worldwide
Interview traduite en français sur Moutons mécaniques - http://moutons.karma-lab.net/en
Interview de Corinne Lepage : http://www.20minutes.fr/article/781886/fukushima-on-maitrise-rien-temoigne-corinne-lepage
Déclaration de Arnold Gundersen. http://vimeo.com/26651670
http://groupes.sortirdunucleaire.org/
Les déclarations du professeur Kodama. Cliquer sur le petit sigle cc pour afficher les sous titres
http://www.youtube.com/watch?v=Dlf4gOvzxYc
http://www.youtube.com/watch?v=mDlEOmcALwQ
Inondation en salle des machines à Belleville sur Loire. http://blogs.mediapart.fr/edition/je-travaille-dans-le-nucleaire/article/170911/inondation-en-salle-des-machines