Si l'on en croit la télévision et la presse en France, tout est en bonne voie à Fukushima, à quoi bon en parler. Les grands vizirs et mammamouchis des médias ont mis l’étouffoir sur la situation réelle et de trop nombreux journalistes semblent avoir obéi. Une exception remarquable, celle de "Pièces à conviction" qui, le 26 février sur France 3, faisait le point sur les suites de la catastrophe nucléaire de Fukushima Daishi, avec une enquête de Lionel de Coninck.
Depuis le début de la campagne de dépistage du cancer de la thyroïde lancée en 2011 par la préfecture de Fukushima, trente-trois cas de cancer ont été recensés chez les jeunes de moins de dix-huit ans. Plus d’une trentaine d'autres cas sont suspects, mais des dizaines de milliers d’enfants n’ont toujours pas été testés. Un spécialiste japonais du cancer de la thyroïde, le docteur Nishio pratique bénévolement des dépistages. Pour lui, les tests des autorités de Fukushima ne sont pas fiables et le Japon est menacé par une épidémie de cancer.
> Olivier Cabanel, dans un article sur AgoraVox dont je vous recommande la lecture, informe que selon un rapport réalisé par le ministère russe de la défense, deux explosions atomiques souterraines ont eu lieu à Fukushima le 31 décembre 2013 : la première avait une intensité de 5,1, et l’autre de 3,6 sur l’échelle de Richter (à titre de comparaison, la bombe d’Hiroshima correspondait à un séisme d’une magnitude de 6). Dans ce même rapport, on apprend que l’architecte du réacteur n°3 avait averti dès le 17 novembre 2011 qu’une explosion hydro-volcanique était inévitable en raison du combustible fondu qui s’échappait de la cuve du réacteur.
> N'oublions pas que les barres de combustibles déchargées du cœur du réacteur pour maintenance à la fin de l’année 2010 sont encore dans un cube en béton situé à trente mètres au-dessus du sol, et à ciel ouvert ! C’est dans cette piscine de désactivation que les combustibles sont les plus nombreux et les plus chauds. Or, la structure est fragile et reste endommagée par l’explosion d’hydrogène intervenue quatre jours après le tsunami. Si une nouvelle secousse venait à se produire, elle viderait le bassin de ou le ferait écrouler, une catastrophe sans précédent ! Les opérations de retrait de ce combustible mortel qui ont commencé le 18 novembre 2013 ont permis de retirer trois cents assemblages sur les mille cinq cent trente cinq officiellement présents.
> Quant aux aux travaux de décontamination du sol qui consistent à prélever une couche superficielle de terre pour la stocker en sacs sur des dizaines d'hectares. Et il faudra tout transvaser dans quelques années dans d’autres sacs ! En effet, ironie amère, les autorités japonaises ont décidé de stocker la terre radioactive dans des sacs biodégradables !!!
Trois ans après la catastrophe nucléaire, il n’y a toujours pas de solution en vue pour les déchets radioactifs qui se sont accumulés un peu partout au Japon. Rien que dans le grand Tokyo, on en compte des milliers de tonnes. Il s’agit de cendres d’incinérateur, de boues de station d’épuration… Dans la province de Chiba, il y en a plus de trois mille tonnes. Les villes de Kashiwa, Matsudo et Nagaréyama, ont produit à elles seules plus de deux mille cinq cents tonnes de cendres radioactives. Le gouvernement a promis de trouver un emplacement pour un centre de stockage définitif à Chiba d’ici 2015, mais il doit faire face à une forte opposition. Les riverains des sites de stockage temporaire s’inquiètent et certains ont porté plainte, de crainte que le stockage devienne définitif.
La province de Saïtama, dans la banlieue de Tokyo, a deux cent quarante cinq tonnes de cendres radioactives, mais elle ne les a pas fait enregistrer comme déchets radioactifs pour ne pas avoir à rechercher un site. Elle espère pouvoir s’en débarrasser discrètement plus tard.
À la fin de l'année 2013, il y avait cent quarante mille tonnes de déchets radioactifs réparties dans douze provinces du Japon.
> Mais revenons à Olivier Cabanel qui relève un autre danger potentiel : celui des quatre cents cinquante mille tonnes d’eau radioactive stockées dans mille deux cents réservoirs qui fuient. Ils provoquent des rejets radioactifs dans l’océan, et contaminent de nombreuses espèces marines. Tous les jours, des centaines de tonnes d’eau hautement contaminées sont déversées dans le Pacifique depuis les ruines de la centrale nucléaire.
Et pendant ce temps nous dit l'Association pour le Contrôle de la Radioactivité (Acro), de l'autre côté de l'océan, à des milliers de kilomètres de Fukushima, des chercheurs de Californie, s’inquiètent de l’arrivée quotidienne de déchets radioactifs sur le littoral. Mais il y en a aussi dans les barquettes de poisson vendues dans les supermarchés. Depuis, les scientifiques tentent d’alerter les autorités : ils redoutent des effets incalculables sur la santé des populations si les poissons du Pacifique continuent à être consommés.
Un panache d'eau radioactive court dans l’océan Pacifique depuis la centrale nucléaire de Fukushima pour atteindre les côtes des États-Unis à partir de 2014 - le pic sera atteint en 2016. Selon une récente étude du Centre de recherche de l’université de New South Wales (en Australie), ce panache a trois origines différentes : des particules radioactives tombées de l’atmosphère dans l’océan, de l’eau contaminée directement sortie de l’usine, et l’eau contaminé par des particules radioactives venant du lessivage des sols.
Une partie du panache radioactif de Fukushima n'atteindra pas les côtes américaines. Il restera dans la gyre du Pacifique Nord – une région de l’océan qui circule lentement dans le sens horaire et qui a piégé des débris dans son centre pour former le fameux sinistre "Garbage Patch Great Pacific." Il continuera à se diluer pendant environ dix ans. Puis le panache finira par échapper à la gyre sous une forme encore plus diluée, et environ 25 % de la radioactivité se répandront dans l’océan Indien et le Pacifique Sud. Il faut s'attendre à ce que les fuites actuelles prennent le même chemin, ajoute l'étude.
Seule la volonté des gouvernements et du lobby de l'industrie nucléaire, désireux de ne pas "provoquer de panique", peut expliquer le silence complice des médias traditionnels. Chacun est en mesure de constater que la consigne de ne pas affoler les populations a été donnée.
Pourtant c'est bien de la menace d'un désastre planétaire qu'il s'agit.
> Sources :
Videos de France TV info. Fukushima : vers une contamination planétaire ? >>> Lien.
Actualités de Fukushima sur le site de l'Association pour le Contrôle de la Radioactivité de l'Ouest (ACRO). >>> Lien.
Fukushima. Alerte radioactivité. >>> Lien.
Fukushima, un désastre illimité. Un article d'Olivier Cabanel dans AgoraVox. >>> Lien.
Reporterre. Fukushima, trois ans après. >>> Lien.
Pour ceux qui lisent l'anglais : The Giant Lie About Fukushima, dans Counterpunch. >>> Lien.
Wikipedia. Accident nucléaire de Fukushima. >>> Lien.