La Borne. 14 juillet. François Fillon est nul en histoire, Eva Joly n'a pas tort non plus. | gilblog-archives. | Jean Pierre Gilbert >

14 juillet. François Fillon est nul en histoire,  Eva Joly n'a pas tort non plus.


14-juillet-1790-Federation-200

14 juillet 1790. Fête de la Fédération au    Champ de Mars.

Commençons par la déclaration en forme de "petite phrase" d'Eva Joly, candidate du parti des écologistes pour l'élection présidentielle, et à l'origine de la polémique. "J'ai rêvé que nous puissions remplacer ce défilé militaire par un défilé citoyen où nous verrions les enfants des écoles, où nous verrions les étudiants, où nous verrions aussi les seniors défiler dans le bonheur d'être ensemble, de fêter les valeurs qui nous réunissent".

Et toc, la réponse est tombée très vite. "Je pense que cette dame n'a pas une culture très ancienne des traditions françaises, des valeurs françaises, de l'histoire française", a répondu François Fillon, Premier ministre et chef du gouvernement, qui avec cette phrase vivement envoyée, est entré lui aussi dans la campagne présidentielle. 

Eh bien, c'est François Fillon qui est nul en histoire, car le 14 juillet n'a jamais été la fête des armées ! 

Allez, on lui offre une petite piqure de rappel...

C'est en mai 1880 que (sur proposition de Benjamin Raspail), les députés firent de l'anniversaire du 14 juillet 1790, la fête nationale des français, vous avez bien lu : 1790. Car la fête du 14 juillet 1790 était la Fête de la Fédération, de la réconciliation et de l'unité de tous les français. En faisant ce choix en 1880, les députés ne voulaient pas célébrer le 14 juillet 1789 qu'ils considéraient comme une journée sanglante. 

La loi proposée par Raspail est promulguée le 6 juillet 1880. Afin que cette fête chômée prenne un caractère national dès le début, le gouvernement encourage dans toute la France, en fonction des moyens des municipalités, des cérémonies laïques dans les écoles, l'inaugurations de statues républicaines, la distribution de vivres aux pauvres, des concerts et des illuminations, des sonneries de cloches, des pavoisements, et la revue des troupes. La participation des troupes prend en effet un relief particulier, après le désastre de Sedan et la capitulation de l’Armée française face aux Prussiens en 1870.

Mais revenons aux origines, car elles sont aussi pleines de sens. La Fête de la Fédération se déroule au Champ de Mars le 14 juillet 1790, un an après la prise de la Bastille. Le site demandant à être aménagé pour recevoir cent mille participants, des travaux de terrassement commencent le 1er juillet 1790 avec mille deux cents ouvriers. Mal payés, ils interrompent souvent les travaux qui prennent du retard. Le gouvernement fait appel aux volontaires parisiens qui viennent nombreux, toutes classes sociales, toutes corporations confondues, pour travailler au chantier. Le jour de la fête, les Parisiens en foule prennent place sur les talus aménagés autour de l’esplanade, au centre de laquelle se trouve l’autel de la Patrie. Les fédérés défilent avec tambours et drapeaux, le roi prend place dans un pavillon dressé devant l’École militaire. Une messe est célébrée par l'évêque d’Autun. Louis XVI prête serment à la Nation et à la loi, et ce serment est répété par la foule. Puis on entonne un Te Deum, avant de se séparer dans l'enthousiasme.

Joly-Fillon-200

Eva Joly et François Fillon, casque ou bonnet phrygien ?

À Lyon, où se tient également la Fête de la Fédération, les participants font ce serment : "Nous jurons d'être inviolablement attachés au grand principe de la liberté individuelle, de protéger les propriétés particulières et les propriétés déclarées nationales, d'assurer la perception de tous les impôts ordonnés pour le maintien de la force publique, d'entretenir la libre circulation des subsistances dans toute l'étendue du royaume, de maintenir, partout où nous serons appelés, l'ordre et l'harmonie, sans lesquels les sociétés se détruisent au lieu de se perpétuer. Nous jurons enfin de regarder comme ennemis irréconciliables tous ceux qui tenteraient de porter atteinte à la nouvelle Constitution ; et nous reposant avec confiance sur la Providence qui soutient notre patriotisme, nous promettons de sacrifier nos fortunes et nos vies pour conserver à nos descendants cette liberté après laquelle nous soupirions depuis si longtemps".

Je vous l'avais bien dit : des origines pleines de sens.

> En somme (et que l'on penche ou non pour sa candidature), avec cette "petite phrase" Eva Joly a simplement fait une proposition conforme aux opinions qu'elle a déjà exprimées. Une proposition qui n'est pas sans rappeler l'esprit du spectaculaire défilé du deux centième anniversaire de la révolution en 1989 à Paris, à l'époque où François Mitterrand était Président. D'ailleurs les Verts de Paris avaient déposé ce voeu au Conseil municipal de la ville en 2010. On aime ou on n'aime pas, mais c'est cohérent.

Quant à l'actuel Premier ministre, il s'est montré peu aimable envers les françaises et les français qui ont acquis la nationalité depuis longtemps ou de fraîche date (il y en a une à l'Élysée). En puis, il devrait tourner sept fois sa langue dans sa bouche avant de parler, et consulter quelques manuels d'histoire, ça lui éviterait de montrer "qu'il n'a pas une très grande culture des traditions françaises et de l'histoire française" lorsqu'il prétend réduire les symboles de la République à un défilé militaire....

Heureusement pour nous (et on vient de le lire dans cette page), la République c'est bien plus riche et bien plus généreux.


> Sources. C'est partout sur Google !