Mercredi 10 juin, le Conseil constitutionnel a recalé le dispositif de riposte graduée contenu dans la loi Création et Internet instaurant l’Hadopi. Considérant que l’Internet est une composante de la liberté d'expression et de consommation, et qu'en droit français c'est la présomption d'innocence qui prime, le Conseil rappelle que c'est à la justice de prononcer une sanction lorsqu'il est prouvé qu'il y a des téléchargements illégaux. "Le rôle de la Haute autorité (Hadopi) est d'avertir le téléchargeur qu'il a été repéré, mais pas de le sanctionner”, conclut le Conseil constitutionnel. Avec cette réponse sur le fond (et non sur tel ou tel aspect formel de la loi), les sages s'expriment avec vigueur. Ils ouvrent aussi la porte à la redéfinition d'une Hadopi qui aurait un pouvoir d'avertissement, mais pas de sanction.
Suite à cette décision, Jean-François Copé, président de l’UMP, a déclaré : "Nous nous plierons à ce qu’a souhaité le Conseil constitutionnel". "Nous ferons en sorte, par une nouvelle loi, que ces dispositions puissent être conformes à notre Constitution".
Le gouvernement et la ministre de la culture tiennent bon. Obéissant à la censure du Conseil constitutionnel, le Ministère de la culture mettra en place l'Hadopi, qui disposera du pouvoir d'avertir les internautes, mais plus de les sanctionner. Christine Albanel souhaite présenter prochainement son projet modifié au Parlement : ce sera donc le juge qui disposera du pouvoir de sanction, comme l'avait demandé l'opposition….
Mais verrons nous l’abandon du logiciel espion de l'Hadopi ? Et de l'usine à gaz qui devait envoyer dix mille avertissements par jour ? Le gouvernement pourra-t-il introduire dans la loi le délit de non sécurisation de ligne, et le sanctionner par la coupure en s’appuyant l’adresse IP comme seule preuve ?
Christine Albanel annonce qu’elle va faire modifier sa loi pour que la sanction soit prise par l’autorité judiciaire. Mais il existe déjà un dispositif juridique qui punit la contrefaçon c’est la loi DADVSI….
Xaver Borderie (fondateur du site WordPress Francophone), commente sévèrement : ”Christine Albanel se rattache à ce qu’elle peut pour donner l’impression qu’elle n’a pas essuyé un violent camouflet de la part du Conseil constitutionnel, en majeure partie dû à son ignorance patente et éhontée de la Constitution française”… et de l’Internet, pourrait-on ajouter.
> Le Conseil constitutionnel a vidé de sa substance le mécanisme de la riposte graduée, mais vendredi 12 juin, le Président de la République a promulgué la loi Création et Internet, sans les dispositions censurées par les sages. La loi a été publiée au Journal Officiel samedi 13 juin, elle entre donc en vigueur.
Un complément au texte de la loi sera présenté dès ce mois-ci en Conseil des ministres pour donner aux juges le pouvoir le prononcer des sanctions. Contrairement à l'Hadopi première version, l'Hadopi bis devra nécessairement respecter les droits de la défense avec le respect de la présomption d'innocence et du droit à un jugement contradictoire.
Mais est-ce la fin du feuilleton ?
On peut lire l’analyse détaillée du rapport du Conseil constitutionnel sur le site de Numérama, un article de Guillaume Champeau.
http://www.numerama.com/magazine/13117-Hadopi-Analyse-de-la-decision-du-Conseil-constitutionnel.html
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