> Des millions de données trouvées sur le réseau ont été malencontreusement rendues publiques en 2006. Près de 20 millions d’informations sur 658 000 visiteurs d’AOL pendant trois mois se sont ainsi baladées dans la nature. La société s’est excusée pour cette bourde monumentale, a retiré de la Toile ces documents confidentiels qui n’auraient pas du s’y trouver et a "sanctionné les responsables". Trop tard, bien sûr pour empêcher la circulation et le téléchargement, qui a notamment débouché sur la création d’un moteur de recherche (sic) sur ces 20 millions de données. L’identité des personnes était, certes remplacée par des numéros, mais ceux-ci étaient accompagnés du numéro de sécurité sociale, du thème de recherche, de la date et de l’heure, des liens cliqués pour chaque requête. De quoi, sur trois mois d’historique, rendre l’internaute identifiable.
> Ce récent scandale dit deux choses : des sites puissants conservent abusivement (elles n’y sont pas obligées) des éléments d’identité de tous les internautes de la planète, et leur utilisation peut être explosive. D’après une société américaine spécialisée dans la mesure de l’Internet, comScore, les Américains ont réalisé pour le seul mois d'octobre plus de dix milliards de recherches en ligne. Toutes ces informations sont stockées, les moteurs identifient chaque ordinateur qui se connecte à eux avec des cookies. Et leurs cookies ont des durées de vie fort longue : 2016 pour Microsoft, 2010 pour Yahoo, 2038 pour Google…
> D’autres événements ont montré l’intérêt de ces données personnelles. En début d’année, le ministère de la Justice américain a demandé aux moteurs de recherche de lui donner leurs historiques de recherche dans le cadre de la lutte contre la pornographie enfantine sur le Net. Microsoft, Yahoo et AOL se sont exécutés. Google a refusé de les livrer en considérant que cette demande était contraire à la confidentialité de son activité et à la protection de la vie privée de ses utilisateurs.
> En juin dernier, Ixquick a décidé de devenir éthique et annoncé que toutes les recherches personnelles de ses utilisateurs contenues dans ses "fichiers journaliers" avaient été effacées (adresses IP des ordinateurs qui peuvent mener à une adresse de domicile et autres paramètres), et qu’il en serait toujours de même à l’avenir dans un délai de 48 heures. "En général les moteurs de recherche conservent ces données pour une longue période, étant donné l’intérêt qu’elles représentent pour les entreprises, les autorités, mais aussi pour les criminels", explique un communiqué de cette entreprise basée aux Pays-Bas. Un de ses responsables ajoute : "Beaucoup de moteurs de recherche utilisent ces données sans restrictions à des fins commerciales. Qu’on en fasse un usage abusif n’est qu’une question de temps". À bon entendeur…..
Extrait de "Écrans" site Internet de "Libération", le 12 avril 2007.