Jeudi 14 décembre. Encore un bravo à la Maison de la culture de Bourges, qui vient de nous offrir "L'orage" d'Alexandre Ostrovski. Cet auteur du XIXe siècle, méconnu en France, est considéré dans son pays comme le père du théâtre russe. Il est aussi un des pères du théâtre moderne et a influencé de nombreux auteurs, Tchékhov en premier - mais aussi Janacek, qui a tiré son opéra "Katia Kabanova" de "L'orage"."L'orage" est une tragédie admirable, qui met en jeu les rapports de famille dans la société russe du milieu du XIXe siècle - une société retardée et cruelle.
Céline Bodis est une Katarina touchante et lumineuse - habitée par son personnage elle domine une distribution un peu inégale. La mise en scène de Paul Desveaux est extrêmement inventive et talentueuse, dommage que ce ne soit pas pour servir le texte d'Ostrovski *. À force de vouloir à tout prix "tirer" la pièce vers notre époque et briller par la mise en scène, Desveaux affadit la force du propos de l'auteur et brouille le sens de l'oeuvre. Si la scène de l'orage est belle, il y a beaucoup trop d'effets (parfois séduisants) mais gratuits - pourquoi ces ballets genre Broadway, ces lampées de vodka hors de propos, j'en passe… Mais, malgré tout ça, "L'orage" est une oeuvre qu'on n'oublie pas. Sur le livret de la MCB, le nom de Desveaux voisine à égale importance avec celui d'Ostrovski, le metteur en scène pense-t-il s'élever de cette manière au rang de co-auteur de la pièce ? Vanité, vanité répète un des personnages de "L'orage"...
"L'orage", d'Alexandre Ostrovski, à la MCB.
Une autorité familiale brutale, incarnée par une mère qui emprisonne sa famille dans le respect des traditions et un marchand avare et tyrannique qui maltraite tout son monde. Une Katarina "mal mariée", jeune femme à peine sortie de l'adolescence, rêveuse, entière et idéaliste. Elle éprouve en secret de l’amour pour son voisin venu de Moscou, neveu désargenté du tyranneau à grande gueule. Il y a encore un mari innocent et lâche, un moujik un peu voyou, des domestiques et une espèce de voyante très ignorants, un clochard idéaliste - le seul à croire au progrès humain... Blanche colombe dans un monde de brutes, Katarina va aimer, se ronger de remords, et mourir un jour d'orage.