La Borne. Le musée Marguerite Audoux. Modeste comme l’écrivain. | gilblog-archives. | Jean Pierre Gilbert >

Le musée Marguerite Audoux. Modeste comme l’écrivain.

Bergère, couturière, auteur à 47 ans de Marie-Claire (prix Fémina 1910), morte en 1937 un peu oubliée, elle est depuis 1990 l’hôte de la mairie d’Aubigny-sur-Nère, vestige restauré et entretenu du  Château des Stuarts.


> Marguerite Audoux ne serait pas devenue célèbre sans les encouragements et le soutien d’illustres contemporains : Octave Mirbeau, Alain-Fournier (qui fait part à Péguy de son admiration pour elle), Valéry Larbaud (qui recopie le manuscrit de Marie-Claire, car Marguerite a des crises d’ophtalmie qui la rendent presque aveugle), André Gide, Léon-Paul Fargue, Jean Giraudoux. Elle a aussi d’autres amis moins illustres : Michel Yell, ami d'André Gide, Charles-Louis Philippe et Francis Jourdain, peintre et décorateur qui réalise pour elle les beaux meubles modern style présentés dans le musée.

Marguerite Audoux naît à Sancoins en 1863 et y vit jusqu’à 1868. Leur mère étant décédée de tuberculose en 1866 et leur père les ayant abandonnées après quelques mois, Marguerite et sa soeur sont accueillies par une tante. Elles sont pensionnaires de l’orphelinat religieux (devenu hôpital général) de Bourges de 1868 à 1876. Puis Marguerite est placée chez un tailleur à Neuvy sur Barangeon en 1876-1877. Elle est bergère à la ferme de Berrué à Sainte-Montaine, à huit kilomètres d’Aubigny, entre 1877 et 1881. C’est là que la découverte d’un vieux livre dans un grenier lui ouvre le monde des histoires. Après un court passage à l’orphelinat de Bourges, elle part pour Paris. Elle occupe différents logements et emplois précaires, (manutentionnaire, couturière, blanchisseuse ). 

En gardant les deux filles abandonnées par sa soeur, elle commence à écrire ses souvenirs. Après avoir acquis la qualification de maîtresse-ouvrière en confection, elle ouvre son atelier.

> Par un ami de sa nièce, elle rencontre des écrivains avec qui elle formera le "groupe de Carnetin", qui se réunit dans ce village de Seine-et-Marne régulièrement jusqu’en 1908.

“Marie Claire” et “L’atelier de Marie-Claire” les deux ouvrages les plus connus de Marguerite Audoux sont les oeuvres d'un écrivain du peuple, mais pas un écrivain social ou politique. Son témoignage est de nature différente, c'est celui d'une femme sensible à la vie des humbles, là où elle vit, en Berry et à Paris au début du siècle. "Et la sensibilité, et la sensualité et la pudeur qu'il y a là dedans ! Qui lui a appris à synthétiser une âme dans un geste, à ne rien dire et à laisser tout entendre. Pourquoi ne pas penser, si invraisemblable que cela puisse paraître, que le génie dispense d'avoir des maîtres" disait de son oeuvre le critique Octave Béliard.

La célébrité ne changera rien à sa modestie, ni à la modestie de ses moyens. Jusqu'à  la fin, Marguerite Audoux usera ses yeux à ses travaux et consacrera ses revenus à sa famille. 


> Le musée, qui  occupe deux pièces et un couloir est un peu à la mode minimaliste, il n’y a que peu d’objets ou de livres exposés, quelques tables-vitrines, des objets personnels, les meubles créés par Francis Jourdain (un précurseur du "design"). Heureusement, une série de panneaux didactiques illustrés, simples mais très documentés, retracent la vie et l’oeuvre de l’écrivain. Cette excellente réalisation du Centre de documentation pédagogique du Cher mérite d'être saluée. Le visiteur a au moins la satisfaction d’apprendre ou de réapprendre quelque chose.

On aimerait un peu plus d’espace, un peu de moyens, la mise en valeur de la bibliothèque, la réunion de pièces éparses (s’il en reste encore). Une ambition à la hauteur de ce grand écrivain, en somme.

Quand y aura-t-il un projet véritable, émanant des services culturels du département, ou de la région, coordonnés avec la municipalité d’Aubigny, pour donner à  Marguerite Audoux la place qu’elle mérite dans un musée digne de ce nom ? 


> Musée de Marguerite Audoux. 18700 Aubigny-sur-Nère. Tél. : 02 48 81 50 07. 

Le musée est ouvert tous les jours entre 14h30 et 19h du 1er juillet au 15 septembre, les samedi, dimanche et jours fériés entre 14h30 et 18h00 de Pâques eu 30 juin et et du 16 septembre au 31 octobre, et les dimanches et jours fériés entre 14h30 et 18h00 du 1er novembre à Pâques. Il peut s’ouvrir à tout autre moment de l’année sur demande. L’entrée est payante : 3 euros.