Edward Snowden vient de trouver des pays d'accueil. Ouf ! Le sort de ce lanceur d'alerte sera peut être meilleur que celui de Julian Assange (réfugié depuis un an dans l'ambassade d'Équateur à Londres) ou celui de Bradley Manning qui risque la mort ou la prison à vie. Et il y a aussi aux États Unis d'autres lanceurs d'alerte victimes de harcèlement et de pressions comme Sybel Edmonds, Frederic Whitehurst, William Binney, Kathryn Bolkovac...
Pour ceux qui ne le sauraient pas encore, Edward Snowden est cet informaticien de la NSA (la centrale de renseignement des USA) qui a révélé au monde le 5 juin le programme "Prism", un programme d'espionnage à grande échelle du gouvernement américain pour surveiller à la fois les citoyens américains et les citoyens du monde entier. En prime, il a servi à écouter les gouvernements des pays amis, comme la France et l'Allemagne.
Snowden est accusé de trahison et son passeport est annulé par le gouvernement des États Unis : un gouvernement qui espionne chacun de nous. Mais c'est Edward Snowden qui est inculpé d'espionnage pour nous avoir avertis !!!
“Étant donné les circonstances, il est improbable que j’aie un procès juste ou que je sois traité de façon convenable avant le procès, et je risque la prison à vie ou même la mort”, écrit Snowden, qui estime que son cas est “très semblable à celui du soldat Bradley Manning”. Le lanceur d'alerte atteindra-t-il son nouveau pays d'accueil sans que son avion soit arraisonné ? Saura-t-il déjouer un "accident" lors de son séjour ?
Pour corser l'affaire, le gouvernement états-unien a demandé à la France et l’Italie de refuser le survol de leur territoire à l'avion du Président bolivien Evo Moralès. Suite à cette demande, le Portugal a interdit une escale technique indispensable avant la traversée de l’Atlantique sous prétexte que Edward Snowden était dans l’appareil. Le président Morales a dû faire escale à Vienne où l’ambassadeur espagnol a tenté de monter dans l’avion. Violation des règles internationales, scandale diplomatique et colère des gouvernements d’Amérique du sud.
> Donc Snowden révèle qu'aux Etats-Unis, 100% des communications sont enregistrées, y compris leur contenu. Cette pratique s'applique à tous les genres de messages. L’ensemble des citoyens américains ont été traités comme des terroristes, tout le monde est ou peut être espionné la bas et dans tous les pays. Les Etats-Unis disposent de moyens colossaux, financiers et techniques, pour récolter les données de leurs citoyens, tout est enregistré et en cas de besoin, les autorités vont piocher dans ces informations. Le gouvernement américain, le président Obama, les représentants du Sénat qui sont chargés de surveiller ce système, admettent ce qu’ils ont fait et le justifient par la défense de la sécurité nationale. Et depuis le Patriot Act (une invention du gouvernement de George W. Bush), à partir du moment où une personne est considérée comme liée au terrorisme, les libertés constitutionnelles ne s'appliquent plus.
Pourtant, le respect de la vie privée est un droit de l’homme consacré par l’article 17 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ; un traité des Nations-Unies que les États-Unis ont ratifié le 8 juin 1992.
Une leçon de cette affaire concerne le président Barack Obama, dont les médias nous disaient qu'il est bien plus "gentil" et bien plus "démocrate" que George W. Bush. En réalité, le "gentil" Barack Obama exécute avec zèle le projet de son prédécesseur.
En voici une preuve. Le 27 mai 2011, le président Obama a signé le renouvellement de trois des dispositions les plus importantes de la loi américaine "Patriot Act", ce qui signifie que l’ensemble de la loi restera en vigueur sans modification jusqu’en 2015. Le Patriot Act des États-Unis a été promulgué le 26 octobre 2001 et constitue l’un des éléments clés de la limitation des droits démocratiques engagée par l’administration Bush sous prétexte des attentats du 11 septembre 2001. Ce projet de loi élargit les pouvoirs des services de police et de renseignement et leur permet notamment de surveiller les communications et d’obtenir les dossiers médicaux, financiers et commerciaux des citoyens.
Réfléchissons un instatant et demandons nous pourquoi les Allemands, les Français, sont espionnés par la NSA ? Dans quel but les opinions politiques sont elles classées, sinon pour répertorier les dissidents et, si nécessaire, organiser une répression contre eux ? Si non pourquoi dépenser tant d’argent ? Pour rien ?
> Dans un article récent, le journal Le Monde décrit l'unanimité du gouvernement français et de la classe politique. "Espionnage de la NSA : la classe politique française estomaquée !" Le ministre des affaires étrangères a même convoqué l'ambassadeur des États-Unis en France, d'après BFM TV.
Est ce que le gouvernement et la plupart des politiciens français nous prennent pour des idiots ? Qu'ont-ils fait, et quelles protestations, quand fin 2010, on apprenait par Wikileaks et Le Monde que les Etats-Unis avaient un programme de collecte systématique des informations personnelles des ambassadeurs et personnels diplomatiques travaillant pour l'ONU, à New York ?
> Mais c’est encore plus inquiétant pour nous, les citoyens. Quand, il y a deux semaines, Edward Snowden a révélé que le gouvernement des États Unis avec Prism examinait de manière systématique les fournisseurs d'emails, Facebook et Twitter, le gouvernement français n'a rien dit du tout ! Pas une protestation ! Pas de mesures de rétorsion ! Pas de gel de négociations du grand marché transatlantique ! Rien. Et pourquoi donc ? Parce qu'un citoyen français vaut moins qu'un diplomate ? Espionner un simple Dupont c'est moins grave ?
Pourtant la Loi n° 91-646 du 10 juillet 1991 relative au secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques stipule que "Le secret des correspondances émises par la voie des communications électroniques est garanti par la loi. Il ne peut être porté atteinte à ce secret que par l'autorité publique, dans les seuls cas de nécessité d'intérêt public prévus par la loi et dans les limites fixées par celle-ci". Et que fait le Président de la République pour nous défendre et faire appliquer l'article 5 de la Constitution ? Pourtant, le droit à la vie privée c'est le premier maillon d'un ensemble indissociable qui comprend la liberté de pensée et de croyance, la liberté d'opinion, la liberté d'expression ...etc. Le Président de la République ne lève pas le petit doigt, il assume donc la violation des correspondances de simples citoyens par le gouvernement des USA et prouve par là son inaction envers une puissance étrangère agissant de façon malhonnête avec la France.
> Étrangement, la France, pourtant pays d’accueil des démocrates menacés dans leur pays, a déclaré ne pas vouloir accueillir Snowden (suite au coup de téléphone de Joe Biden ?). Tout comme l’Italie, l’Allemagne, le Brésil, la Norvège, l'Inde, la Pologne, l'Islande, l'Autriche, la Finlande, les Pays-Bas et l'Espagne. Peur de fâcher George W. Obama ?
En tous cas, cette affaire est riche de sinistres enseignements. Le premier est que le gouvernement d'un état étranger (les USA), espionne la vie privée de n’importe qui dans n’importe quelle région du monde, y compris en France. Mais c’est encore pire ailleurs sur la planète (Irak, Afghanistan, Pakistan, Afrique) où les Etats-Unis exécutent carrément les individus, des "terroristes" qu'ils prennent pour cible. A tout moment un missile de croisière états-unien ou un drone peut frapper et tuer sans que l'autorité locale puisse demander des comptes à l'agresseur. Un autre enseignement est que les dirigeants de nos pays, à l’exception de quelques cas (Russie, Chine, Iran, Syrie…) sont tellement inféodés à l'empire états-unien qu’ils lui obéissent au doigt et à l’œil, ce qui démontre avec éclat la servilité de nos gouvernants et la perte de souveraineté de nos États.
> Pour en savoir plus :
Le "Patriot act" dans Wikipedia. >>> Lien.
Droit et libertés. Entretien avec Jérémie Zimmerman sur AgoraVox video. >>> Lien.
Les grandes oreilles d'Obama tirées par Glenn Greenwald et Edward Snowden. >>> Lien.
L'état de nécessité. Le Président de la République coupable de haute trahison. >>> Lien.
Lire dans gilblog : L'espionnage mondialisé des citoyens. >>> Lien.