Il y a quatre ans, la réalisatrice Ovidie a décidé d'arrêter le sexe avec les hommes. Trop d'investissement pour si peu en retour, estime-t-elle. Elle retrace son expérience dans son livre La chair est triste hélas. Lors de cet entretien exclusif, Alain Broglio a demandé à Ovidie ce qu’elle a connu et ne veut plus.
Bonjour Ovidie,
Tout d’abord, je tiens à vous remercier de bien vouloir m’accueillir dans le cadre magnifique du village de la Borne, et surtout en tant que journaliste masculin; ceci dit, rassurez-vous je ne suis pas ce grand méchant loup lubrique qui va vous dévorer toute crue à la sauce “Raku” qui est par ailleurs une spécialité Bornoise mondialement connue et reconnue !
Afin de mieux introduire la chose, si j’ose dire, j’ai lu La chair est triste hélas, votre traité sur les effets de “La mal baise”, et à l’issue de cette lecture, je dois vous l’avouer, je fus tant déstabilisé que je dus me rendre pour plusieurs séances chez le psychanalyste afin de comprendre qui j’étais et comment je pouvais extirper le mal mâle qui était en moi.
Pourriez-vous Ovidie préciser pour nos lecteurs comment vous voyez l’amour physique entre deux être hétérosexuels ?
Ovidie : Eh bien, vous avez raison Alain, pour moi l’acte dit d’amour se résume à mon ressenti, c'est-à-dire un dégoût, un manque d’envie, une sensation de saleté, mais rassurez-vous, je ne veux priver personne de dessert…
Alain Broglio : mais au fond Ovidie, vous avez toujours appréhendé la chose (comme dit ma vieille voisine) sous cet aspect ?
Ovidie : Au fil du temps, à chaque rapport, j’avais mal et tout fait mal dans l’amour même dans sa préparation ! Pour exemple, s’épiler ça fait mal avant de passer à l’acte et puis après il faut subir l’homme ! A l’issue, je prends de la poudre de Cranberry afin de lutter contre les cystites et le lendemain, je consulte un médecin à cause des épidémies potentielles parce que l’on s’aperçoit que son partenaire d’un soir ne s’est pas lavé les mains et qu’il va vous avoir refilé une mycose.
Rendez-vous compte de tout ce que l’on vous impose, de tout ce qu’il faut faire pour être désirable. Tous ces trucs extrêmement techniques sont épuisants. A tous les coins de rues, on peut entendre : "Il faut souffrir pour être désirable", alors un jour j’en ai eu par-dessus la tête de courir pour garder la taille fine, de subir des peelings pour garder la peau douce et tout cela pour subir les assauts égoïstes d’un rustre qui ne sait offrir que des douleurs vaginales et anales !
Alain Broglio : Ovidie, lorsque nous avons préparé l’interview, vous m’avez déclaré qu’en retour de l’acte sexuel, c’était pour vous “L’orgasm gap”. Pourriez-vous m’éclairer sur ce phénomène ?
Ovidie : Bien évidement mon cher, en tant que mâle, vous n’êtes pas touché par ce phénomène, cela reste en dehors de votre champ de connaissance… L’orgasm gap réside, pour simplifier, dans le fait que le taux d’orgasmes entre hommes et femmes n’est pas du tout en faveur des femmes. Cela n’a rien de réjouissant et en conséquence, la lutte pour l’égalité des sexes devra se poursuivre jusqu’au lit. Alors à quoi sert le diktat de la chirurgie esthétique pour arriver à ce résultat ? Avoir mal pendant l’acte sexuel pour si peu de plaisir ? Risquer sa vie pour se faire grossir les seins ? C’est cela Alain que vous nous faites subir ! La femme ne fait pas l’amour pour le sexe, mais en contrepartie d’autre chose : Trouver un bon parti, se mettre à l’abri, avoir un statut social, car, il faut le savoir, une fois qu’il y a eu érection et éjaculation : On ferme la boutique et on ne s’occupe pas de l’autre.
Alain Broglio : Permettez-moi de vous dire Ovidie que vous avez une vision des relations humaines pour le moins négative. Franchement, vous êtes provocatrice, non ?
Ovidie : Ah que non ! Et là je vois que vous avez une méconnaissance totale des femmes, c’est simplement désolant.
Eh bien sachez que les filles ont appris à faire semblant et qu’elles font l’amour par politesse. Lors d’une rencontre furtive, elles se disent : bon il a payé le restaurant, on va aller jusqu’au bout maintenant…
J’en suis à ma quatrième année de grève du sexe et ce n’est pas une rédemption, ni un outil de révolte, ni une abstinence, ni une révolte. En me sortant de l’hétérosexualité, je jouis désormais absolument seule et rassurez–vous au-delà du contexte politique et des convictions, il y a des mecs de gauche qui baisent comme des mecs de droite. Etonnant ne trouvez-vous pas ?
En conclusion, la société nous apprend à faire plaisir mais pas à prendre du plaisir !!! Je vous autorise à conclure votre article par ces phrases qui résument parfaitement mes luttes pour mes libertés tant morales que physiques :
En fait, j’en ai marre d’être juste mal baisée et surtout je ne veux plus être validée par le regard d’un homme.
Alain Broglio : Eh bien Ovidie je vous remercie pour votre franchise et votre transparence ainsi pour le temps que vous avez eu la gentillesse de me consacrer. Nos lecteurs vont dévorer cet article ainsi que votre livre. Nous aurons tous appris énormément de choses sur les positionnements féminins. Certains auront certainement un questionnement à propos de la procréation et de l’avenir de l’humanité, mais nous pourrons en débattre une autre fois.
En attendant, il est midi sonné, permettez-moi de vous inviter à découvrir cet excellent petit restaurant Bornois L’épicerie et ce, soyez en certaine, en tout bien tout honneur et sans contrepartie aucune…
Alain Broglio. Envoyé spécial pour gilblog, ex-expert auprès de la défunte “Police des mœurs”.
> Avertissement: tous les propos tenus par Ovidie sont vérifiables en réécoutant le lien ci-dessous . En complément d’information, il faut savoir qu’Ovidie dans un temps reculé a été une travailleuse du sexe.