Ce matin là, Berlaudiot n’arrive pas à se lever du lit, il se sent mal. Il a de fortes douleurs au ventre, il gémit, il ne peut plus bouger tellement qu’ça y fait mal dans l’besou.
Après l’avoir un peu secoué et traité de douillet, la Huguette voit que c’est du sérieux. Elle lui met une bouillotte bien chaude su’ l’estouma’ mais sans résultat. Et les cataplasmes ne font pas d’effet.
Et le pauvre Berlaudiot se plaint toujours.
Alors, la Huguette a une idée ; pas plus tard que tout à l’heure elle ira consulter la Julie Chevreau. La Julie Chevreau, dite la Papète, est une rémégeuse, une espèce de sorcière qu’habite en forêt au carroir du marlou. La Papète a la réputation de guérir toutes les maladies rin qu’à voir la pisse du malade.
Alors Berlaudiot pisse dans une tasse que la Huguette verse dans un bouteillon. Puis elle se met en route pour confier son précieux échantillon à la science de la Papète.
Sur le chemin de la forêt elle avance avec précaution, car les convois des bûcherons sont passés par là et ont creusé de nombreuses ornières. Et ce qui devait arriver se produit, Huguette glisse et laisse échapper son bouteillon. En tombant dans l’ornière, le bouchon saute et l’urine à Berlaudiot se mêle à l’eau boueuse.
La Huguette ne perd pas son sang froid, elle remplit aussitôt le flacon en espérant avoir sauvé un peu de l’urine à Berlaudiot.
Tout essoufflée elle arrive enfin chez la Papéte. La remégeuse examine la fiole en grommelant et fait asseoir la Huguette pendant qu’elle prépare une pommade qu’elle tasse dans un petit pot à confiture. “Tu y massera bin su’ l’besou et pi l’estouma’ pendant treize minutes, pas une de moins, et ton Berlaudiot il ira mieux”.
De retour à la maison la Huguette relève la chemise de Berlaudiot et étale soigneusement la pommade sur son ventre, du nombril jusqu’au haut des cuisses. Ça vient, y a comme une amélioration. Berlaudiot commence à ressentir comme un soulagement.
Alors la Huguette s’active et frotte et masse avec entrain.
“La remégeuse l’avait bin dit en voyant ton urine ! À disait en r’gardant l’bouteillon qu’t’avais avalé eun’ charrette… Eh bin Berlaudiot, v’là déjà l’timon qui se r’dresse !”
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