Dans son livre "Mon village en Haut Berry", Robert Chaton raconte le temps du catéchisme et de la première communion ...et les quatre kilomètres que les enfants de La Borne effectuaient à pied pour rejoindre Henrichemont. En ce temps là, "l'ordre du cortège (de la communion) était en principe établi d'après les résultats et l'assiduité au catéchisme, mais nous savions tous que le curé s'arrangeait toujours pour satisfaire sa coterie henrichemontaise, et plaçait en tête les enfants des tanneurs, médecins et autres notables, ceux de La Borne étant régulièrement en queue" (page 39).
"En 1895, le refus du Conseil municipal (d'Henrichemont) de participer à l'édification de leur chapelle fut ressenti par les Bornois comme une vexation et une blessure dont le souvenir était resté vivace" (page 75).
De quoi stimuler encore plus le désir des bornois d'avoir leur propre lieu de culte ....et de quoi alimenter la transmission orale de l'histoire qui dit que les habitants de La Borne ont construit eux mêmes la fameuse chapelle.
C'est là qu'intervient Christian E. Roth (de la Société d'Archéologie et d'Histoire du Berry) qui après avoir compulsé les archives, donne de nombreuses précisions qui tempèrent quelque peu la légende ! Mais dans tous les contes il y a du vrai, et si les habitants de La Borne n'ont pas tout fait par eux mêmes, ils ont fortement voulu "leur" chapelle et largement contribué à son édification en fournissant les matériaux, comme on va le lire.
Voyons maintenant ce qu'en dit Christian E. Roth.
" Les habitants du village de La Borne réclamaient depuis longtemps qu'une église soit construite dans leur clairière forestière et potière, entre La Borne d'en haut et La Borne d'en bas. Des projets voient le jour avec les curés Trémeau et Aupic.
Dès sa nomination en 1894 Ie curé Jean-Désiré Rousseau (I846-1909) prend I'affaire à bras Ie corps ; il sollicite la générosité des notables, organise des souscription auprès de ses paroissiens avec l'appui des familles Charles Panarioux et Talbot-Cottereau. Un terrain est acquis auprès de François Foucher-Pellé, un plan est dressé par M. Guérin-Hervier, entrepreneur et architecte à Aubigny-sur-Nère ; les Bornois offrent des dons en nature : briques (pas moins de 31 300), chaux, sables, cailloux - et en journées de roulage.
La première pierre est posée à Pâques 1895 et le gros oeuvre réalisé fin 1896-début 1897 par monsieur Jabier, entrepreneur à Henrichemont. Des vitraux en losanges sont commandés auprès de la maison Fournier de Tours ; au printemps 1897 un autel est choisi ; le Docteur Deschamps donne un harmonium.
L'ouverture au culte se fait en toute discrétion au cours du mois de Marie 1898 et Ia première messe y est célébrée Ie 31 Août 1898 avec un grand concours de fidèles mais sans I'autorisation explicite, tant des autorités ecclésiastiques que républicaines. Propriété pleine et entière du curé d'Henrichemont, Ia chapelle (placée sous le vocable de Saint Jean-Baptiste, patron des potiers), échappe ainsi en 1906 aux inventaires de Ia loi de séparation des Eglises et de I'Etat en 1905.
La façade provisoire, fermée par un simple hourdis en planches et briques, est bâtie en dur avant 1909 et muni d'un modeste clocher sans cloche.
Avant sa mort (20 juin 1909) le curé Rousseau lègue son bien à trois confrères ecclésiastiques : Monseigneur René de Boismarmin, les abbés Jean-Baptiste Gaudiart et Joseph Rimbault. Ce n'est qu'en 1928 - le 5 Août - qu'une cloche prend place dans le clocher (marraine Louise Talbot, parrain Paul Brateau) et que Monseigneur de Boismarmin cède la chapelle à l'Association diocésaine de Bourges qui en est toujours propriétaire ; elle est louée à Ia commune d'Henrichemont depuis 1984 pour y abriter les collections rassemblées par "l'Association de sauvegarde et de protection du patrimoine potier et du site de La Borne", noyau initial de l'incontournable Musée de la Poterie ouvert en 1987 ".
> Les bornois avaient fait de cette histoire une chanson qui fut publiée dans le Journal du Sancerrois le 15 mars 1896. Une partie du texte figure dans le livre de Robert Chaton : "Potiers d'aujourd'hui au pays de La Borne" (page 44). Le voici.
Dans le village de La Borne
Qui compte huit cents habitants
Que pour la poterie on renomme
Les gens n'étaient pas contents
Car pour aller à l'église
Et s'en aller à Henrichemont
Par le soleil et par la bise
Cinq kilomètres c'est un peu long.
Ils ont demandé au Coneil
Il nous faudrait une chapelle
On ne vous la demande pas belle.
Le Conseil a répondu
De l'argent y en a plus
Et quand même il y en aurait
À La Borne y va jamais !
Mais les bornois
Qui n'sont pas têtes de bois
Entre eux tous ont souscrit
Pour leur chapelle
Ils en ont assez
D'Henrichemont vont se passer
Et la chapelle se construit
Elle sera belle.
> Outre les expositions du musée, les murs de l'ancienne chapelle portent les médaillons d'un chemin de croix en grès modelé par André Rozay. À droite de l'autel une niche contient une Vierge à l'enfant de Jacqueline Lerat. Une autre abrite une sculpture réalisée en grès par le sculpteur berruyer François Popineau. Le musée est géré et animé par l’Association de sauvegarde et de protection du patrimoine potier et du site de La Borne (association Loi de 1901), qui a pour but de sauvegarder le site et de collecter pièces et documents du patrimoine potier. Le musée de la poterie, a acquis au fil des ans une collection remarquable de pièces anciennes de la Borne.
Chaque année, le musée présente une exposition thématique qui permet de découvrir des pièces prêtées par d'autres musées et des collectionneurs, ou encore achetées par l’association. Des vidéo sur le travail du potier et les ateliers bornois complètent la visite.
> Document : " La chapelle Saint Jean de La Borne (1895-1898)", par Christian E. Roth de la Société d'Archéologie et d'Histoire du Berry. Remis par son auteur le 7 octobre 2012 à l'Association de sauvegarde et de protection du patrimoine potier et du site de La Borne.
> Dans gilblog, lire la page sur le Musée de la poterie de La Borne. >>> lien.