Dans une video du film enregistré en octobre 1965 pour l’émission “Les conteurs-Itinéraire Berrichon”, à 7 minutes et 55 secondes, le potier Alexandre Foucher, parle de son travail. Alexandre Foucher, ancien conseiller municipal et adjoint au maire d’Henrichemont, dont on pouvait lire quelques anecdotes dans une page précédente de gilblog, parle de son métier "qui est loin de s'apprendre en un jour”. Son atelier et son four sont toujours là, à La Borne d’en haut sur ”Le grand chemin”. Dans les mêmes locaux, son gendre Jean Migeon, puis Didier Potelune lui ont succédé.
Voici une transcription brute de ce passage du film, avec probablement quelques fautes et erreurs dues à l’accent, à la qualité de l’enregistrement et à mes oreilles parfois défaillantes.
Mais laissons parler Alexandre Foucher…
- Il y a pas un secret de la main. On pourrait regarder pendant dix ans, on saurait pas le faire, il faut le faire soi même.
Pour faire un potier, pour faire un potier, c’qu’on appelle un potier... pour faire un bon potier faut au moins cinq ans. On peut guère faire un potier en cinq ans minimum. En commençant à douze ou treize ans, fallait attendre, fallait au moins cinq ans ou six ans pour apprendre à faire de bonnes pièces. Pour être un bon potier, quoi.
Il y a rien de mystérieux. Des fois c’est ceux qui avaient le moins d’instruction qui réussissaient le mieux. C’est un don. Y a pas besoin d’instruction Eh bin, c’est pourtant comme ça. C’est l’art de faire ses différences d’une main à l’autre. Si tu le perds, y se sauve, y s’en va n’importe où (il parle sans doute du pâton de terre sur le tour).
Faut l’sentir, faut l’sentir, faut l’sentir. Et puis alors faut un peu de culot, il y en a qui ont peur, …y s’promène (toujours le pâton sur le tour), et puis alors c’est foutu.
Y faut pas regarder pendant quatre ans, y faut y toucher, la travailler (la terre), en casser ! En casser un, en casser deux, en casser dix, avant d’en faire un ! Et puis, petit à petit, ça vient. Et quand on y est trop longtemps, quand on est apprenti, quand on y est au dessus d’une heure, c’est foutu, parce que les nerfs y se mettent en pelote….
Pour travailler avec un four de trente quatre mètres cubes comme j’ai actuellement, il me faut quatre mille pièces pour mettre au four. Et pour faire quatre mille pièces, avec mon beau fils il, il me faut cent dix jours. Comprenez vous ? Quatre vingt jours de tournage, quinze jours d’enfournement, quinze jours de chauffage et huit jours pour le refroidir. Donc, je ne peux faire que trois fours par an, maintenant.
À la neuvième minute (9.40), un autre potier, Raymond Bedu, poursuit en évoquant le temps où les grands fours à bois fumaient tous les jours. "Pensez qu’à un certain moment, il n’y avait pas une journée où on ne voyait pas fumer La Borne. Pas une journée ! Tandis que maintenant faut bin compter deux ou trois mois pour voir une fumée…."
> La video est dans gilblog: La Borne 1965. Potiers, conteurs et chanteurs… >>> Lien. Attention, sur le site web de l’INA (Institut Supérieur de l’Audiovisuel), Itinéraire Berrichon” le lien vers cette video ne fonctionne plus.
> L’émission “Les conteurs” dont est extrait cet ”Itinéraire Berrichon”, a été réalisée en octobre 1965 par André Voisin. Elle était produite par le Service de la Recherche de l’ORTF (qui durant quinze années, de 1960 à 1975 a produit plus d’un millier de titres).