Le colonel Rossel, un communard atypique.

causerie-Rossel copieBiographie-par-Édith-ThomasRossel

Louis Nathaniel Rossel, colonel du génie, chef d’état-major sous la Commune, est un personnage singulier de l'Histoire. D’un caractère intransigeant, mû par le patriotisme le plus pur, il veut prolonger la lutte contre les prussiens et refuse la défaite. Il n’a pas trente ans lorsqu’il est condamné à mort et fusillé par les versaillais après une carrière fulgurante et mouvementée. Une belle figure romantique et tragique que présentera Michel Pinglaut le 17 février à 19h30 à l’Antidote (88 rue d’Auron). Clin d’œil de l’Histoire, Rossel a été affecté à Bourges en 1869 et 1870, il habitait rue d’Auron, puis rue de la Cage Verte. Ce personnage hors du commun a fait l’objet d’une remarquable biographie par Édith Thomas, et son histoire a été portée plusieurs fois au cinéma. 

Louis Nathaniel Rossel naît  le 9 septembre 1844 à Saint-Brieuc, son père est Louis Rossel, colonel, officier de la Légion d’honneur, un républicain qui refuse de signer le serment de fidélité à Napoléon III.  Ses études varient selon les affectations de son père (Mâcon, Saint-Brieuc, Nîmes). Il entre à onze ans au Prytanée de la Flèche pendant que son père est en Crimée. Brillant élève, il est admis à dix-huit ans à l’École polytechnique et en sort remarqué. Il est nommé sous-lieutenant à Metz en 1864 et suit l’enseignement de l’école du Génie. 

À la veille de la guerre de 1870, Louis Rossel est capitaine, membre de l’état-major du Génie à Bourges de 1869 à 1870. Il travaille assidument sur un projet de nouvelle caserne. Il est bien noté par ses supérieurs. Il connaît bien tous les travaux, notamment ce qui concerne les mines, il dessine fort bien, il monte convenablement, “c’est un officier instruit et très bien doué sous le rapport du zèle” disent ses supérieurs. Ils ne savent pas encore que c'est une "forte tête”….

En 1870, il fait campagne dans l’armée de Bazaine et travaille aux fortifications de Metz. Il organise une sortie le 28 octobre, mais il est fait prisonnier avec ses compagnons. Il s’évade pour rejoindre la France, par Luxembourg, Bruxelles et l’Angleterre et rejoint le gouvernement de la Défense nationale pour se mettre au service de Gambetta et participer à la résistance à l'envahisseur. 

Chargé par de Freycinet d’une mission à l’armée du Nord, il organise le camp de Nevers avec le titre de colonel du Génie. Bouleversé par la signature de l’armistice avec les Prussiens, il accourt à Paris le 20 mars 1871. Il écrit au ministre de la guerre : “j’ai l’honneur de vous informer que je me rends à Paris pour me mettre à disposition des forces gouvernementales qui peuvent y être constituées. Instruit par une dépêche de Versailles rendue publique aujourd’hui, qu’il y a deux partis en lutte dans le pays, je me range sans hésitation du côté de celui qui n’a pas signé la paix et qui ne compte pas dans ses rangs de généraux coupables de capitulation”

Quelques jours plus tard, la dix-septième légion de la Garde nationale fédérée le met à sa tête, puis il est nommé chef d’état-major au ministère de la Guerre le 3 avril. “En haine de ceux qui ont livré ma patrie, en haine du vieil ordre social, je suis venu me ranger sous le drapeau des ouvriers de Paris. J’ignore ce que sera l’ordre nouveau du socialisme; je l’aime de confiance. Il vaudra toujours mieux que l’ancien”.

execution-de-louis-rossel-INA

Il entretient des relations parfois orageuses avec le comité central de la Commune qui siège à l’Hôtel de Ville. Désireux de rétablir la discipline militaire, il accepte la présidence de la Cour martiale et s’emporte contre l’inefficacité de la Commune ou l’activité trop verbale de Félix Pyat. Il se dépense sans compter pour unifier le commandement, organiser la défense et l’artillerie, réquisitionner des chevaux. Il établit des règles de combat très strictes, dont la violation est passible de la peine de mort. La troupe gronde, le Comité du dix-septième arrondissement le fait arrêter un instant pour sa rigueur, mais c’est lui-même qui démissionne avec éclat parce que ses ordres ne sont pas suivis.

Le 30 avril, la Commune, qui apprécie ses qualités, le nomme délégué à la Guerre en remplacement de Cluseret. Mais, les moyens sont insuffisants et l'armée des communards n'est guère formée à se battre… Il annonce dans un communiqué laconique la prise du fort d’Issy par les versaillais, dont la défense lui a été confiée. La Commune le fait alors arrêter, mais il s’enfuit et se cache sous un nom d’emprunt. Il ne prend aucune part aux combats de la Semaine sanglante. 

Il est arrêté le 8 juin par la police versaillaise, suite à une dénonciation. Il est traduit devant le 3e conseil de guerre, mais sa condamnation est annulée car il ne serait pas coupable de “désertion à l’ennemi”, mais de “rébellion armée”. Il est condamné le 7 octobre 1871 à la peine de mort. Une campagne inattendue, au vu des circonstances, se déclenche en sa faveur, manifestations d’étudiants, articles dans la presse. On le présente comme un patriote pur et dur, une sorte de Saint-Just, qui a osé blâmer les actes de la Commune et a été arrêté par elle. Mais le gouvernement de Thiers a besoin d’un exemple, sa grâce est refusée le 26 octobre 1871. Louis Rossel est fusillé à l’âge de vingt-sept ans, au camp de Satory à Versailles, après la dégradation militaire, le 28 novembre 1871.
La veille de son exécution, il déclare : “Si des officiers courageux et patriotes se courbaient devant des exigences indignes, acceptant la fuite, la capitulation, ce n’était pas par crainte de la mort, mais par crainte du déshonneur. Vous n’aurez plus désormais cette ressource : j’aurai appris à tous qu’il y a des jours où un soldat discipliné et fidèle doit désobéir et peut désobéir sans se dégrader”.

Louis Rossel a été inhumé le 30 novembre 1871 au cimetière protestant de Nîmes.

> Illustrations de haut en bas. L’affiche de la conférence du 17 février. Biographie par Édith Thomas. Photo-portrait d’époque.  L'exécution de Rossel, extrait du film de Jean Prat-INA.

> Sources. Édith Thomas, Rossel. Éditions Gallimard. 
La Commune et les communards du Cher, par Jean-Pierre Gilbert. L’Alandier.




Gilblog La Borne mon village en Berry, est un blog de clocher, un cyberjournal d’expression locale et citoyenne. Dans gilblog, lisez des nouvelles de La Borne et du Berry en mots et en images, pages vues sur le web, citations, dico berrichon, coups de gueule et coups de coeur. Tout ça est éclectique, sans prétention et pas toujours sérieux, mais gilblog est amical avant tout. Gilblog, un site web fait à La Borne et réalisé entièrement à la main sur Mac, avec l'excellent  logiciel SandVox. © Photos Marie Emeret & JP Gilbert. © Textes et dessins JP Gilbert. Cartes postales anciennes: collection JP Gilbert. Vignettes : Dover éditions. Toute image ou contenu relevant du droit d’auteur sera immédiatement retiré(e) en cas de contestation. Les commentaires sont les bienvenus sur ce site. Les avis exprimés ne reflètent pas l'opinion de gilblog, mais celle de leurs auteurs qui en assument l’entière responsabilité. Tout commentaire vulgaire ou injurieux, ne respectant pas les lois françaises, tout billet insultant ou hors sujet, sera automatiquement revu ou rejeté par le modérateur, ainsi que les messages de type SMS et ceux des trolls. Conformément à la loi, votre adresse IP est enregistrée par l'hébergeur.