Jacques Martel, de son vrai nom Alfred Mallet naît à Léré, dans le nord du Cher, le 8 septembre 1877. On le connaîtra bientôt à Paris et dans toute la France sous son nom d’artiste, Jacques Martel. Ce poète et chansonnier berrichon plein de talent a connu la renommée au siècle dernier, entre les deux guerres.
Le futur Jacques Martel a cinq ans le 28 août 1882, jour fameux où l'enseignement laïque, gratuit et obligatoire est instauré. À Léré, Alfred est élève dans la classe de l'instituteur Monsieur Paquet qui remarque sa vive intelligence. L’instituteur pense qu'Alfred doit poursuivre ses études mais ses parents ont besoin de lui à l’atelier.
Il commence son apprentissage de tailleur à l'âge de treize ans auprès de son père. À la même époque il se découvre une passion pour le solfège et la composition (son son père est membre de la “Lyre Léréenne”). Première notoriété : ses premières compositions sont jouées par l'harmonie lors de noces ou de comices.
Il tombe amoureux de Marguerite Godon et en 1899, à vingt-deux ans, il “monte” à Paris avec elle malgré les réticences familiales. D’abord ouvrier tailleur, il prend son indépendance et ouvre sa boutique, avenue Daumesnil. Le travail démarre bien, il épouse Marguerite le 7 mai 1901 et décide de faire venir son frère Louis, pour l'aider. Il commence à écrire.
La fameuse crue de la Seine de 1910 atteint son atelier. la famille retrousse les manches et se remet au travail. Les affaires reprennent. Alfred va désormais pouvoir se consacrer à l'écriture et à la musique.
Il décroche un premier contrat dans un café-théâtre puis dans des petits cabarets sous le nom de scène Jean Berry. Les spectateurs aiment l’entendre improviser sur des thèmes donnés par la salle. Sa renommée vient aux oreilles de Xavier Privas, surnommé le Prince des chansonniers, qui veut faire sa connaissance. Il est conquis. Ils deviennent amis.
Outre Xavier Privas, il côtoie les “vedettes” de la chanson montmartroise comme Aristide Bruant, René Dorin, Frehel, Vincent Scotto et rencontre le succès avec ses chansons berrichonnes. Il est engagé au Chat noir, au Moulin de la Galette, au Lapin Agile, au Caveau de la République, Chez Bruant, et dans les théâtres de variétés.
À cette époque Alfred Mallet/Jean Berry réalise une autre ambition : il devient Jacques Martel et fonde une revue littéraire et musicale, “Le Flambeau” dont le premier numéro paraît le 8 mai 1914. Xavier Privas soutient son projet.
Malheureusement, le 1er août 1914, la guerre est déclarée. Jacques Martel est affecté à l'intendance à Bourges à cause de sa santé fragile. Il compose des poèmes patriotiques qui seront publiés dans “Les Larmes rouges”.
La guerre terminée, Jacques Martel revient à Paris, arrête le métier de tailleur. et fonde les “Éditions artistiques du Flambeau”, à Saint-Mandé.
Dans la nuit du 7 au 8 août 1922, un incendie ravage les locaux de saint Mandé, détruisant dix mille exemplaires du Flambeau, des volumes imprimés et des milliers de chansons. Son fidèle ami, Xavier Privas lance une souscription avec l’aide des chansonniers parisiens qui organisent un spectacle de soutien. Grâce à cette solidarité des artistes, les éditions du Flambeau renaissent.
Le Petit Casino, Le Chat Noir, le Lapin Agile, le Moulin de la Galette, le Caveau de la République, le Moulin de la Chanson et d’autres cabarets continuent à engager Jacques Martel. Il se produit à Paris et, sa renommée le conduit dans les casinos à la mode, Deauville, Vittel, Lyon, Genève, Lausanne et, Bruxelles.
Jacques Martel crée aussi une émission de radio “Le Quart d'heure berrichon”, il enregistre chez Polydor, de nombreux disques de poèmes et chansons tout en écrivant dans Le Flambeau. En 1927 il est promu “officier des Beaux-Arts”, puis il est fait chevalier de la Légion d’honneur le 1er août 1936.
Il revient définitivement à Léré avec sa famille en 1939 avec la deuxième guerre mondiale. Léré devient le siège des éditions du Flambeau, et Jacques Martel, toujours chansonnier et homme de scène se produit encore et participe à des galas pour les soldats prisonniers.
En 1941, il est hospitalisé à Cosne pour un cancer de l'estomac. Il décède le 30 décembre 1941, à l'âge de soixante-quatre ans. La foule se presse à ses funérailles au cimetière de Léré, le 2 janvier 1942.
Jacques Martel a enregistré des disques et publié de nombreux recueils en français et en parler berrichon. Il est l’auteur de plusieurs pièces de théâtre. Des cartes postales affichant ses quatrains sont éditées. Il est aussi le parolier de deux grands succès de la chanson d'avant-guerre : “Je n'ai qu'une maman” et “La Madone aux fleurs”, interprétées par Berthe Sylva et Rina Ketty.
Ses œuvres n’ont malheureusement pas été rééditées, mais on trouve assez facilement ses recueils chez les bouquinistes. Et plusieurs pages lui sont consacrées dans “Les chansonniers du Berry - deuxième époque”, 1986. Christian Pirot. Pages. 52 à 86.
> Titres de quelques recueils de Jacques Martel. Ene rude attelée. Devant les landiers. Allumons le falot. Le restant de la potée. La maison sous l’orage. La Poêlée. Les larmes rouges. À coups d’van. Le Pays. Chansons du vent de Loire. Chansons de mon clocher. Chansons du vieux Berry. Chansons de la terre natale.
> Théâtre. Les gendres du père Michot, Mademoiselle de Blanchaume, L'appel du clocher, La princesse Eudoline.
> Sources. Florilège de Jacques Martel par Jean Mellot. Les chansonniers du Berry - deuxième époque, par Christian Pirot. Éditions Christian Pirot 1986. Isaure Leloup, Le Berry Républicain du 21 octobre 2016.