Mercredi 16 octobre Michel Pinglaut parlera de Félix Pyat, homme de lettres et homme politique, communeux et berrichon, célèbre en son temps. La conférence aura lieu à à 19 H 30 à l’Antidote 88 rue d’Auron à Bourges. Petite entrée en matière….
Félix Pyat, fils de Félix Aymé Pyat, avocat, et de Catherine Perpétue Legay, est né le 4 octobre 1810 à Vierzon. Le jeune Pyat fait des études secondaires brillantes dans le Cher. Il est diplômé de la Faculté de Droit de la Sorbonne et reçu avocat en 1831. Et déjà, il montre qu’il n’est pas du genre tiède ! Encore étudiant en droit, pendant la Restauration, il participe à un banquet organisé par les étudiants du Cher. Au cours du repas, il remplace un buste du roi Charles X par celui de La Fayette et il porte un toast à… la Convention ! L’épisode résume le caractère du bonhomme, brillant orateur, mais dont les effets de tribune agacent ses contemporains.
Pyat, aurait pu être inscrit au livre des records de son époque. Son casier judiciaire, particulièrement chargé, présente “un résumé chronologique de tous les événements” qui ont bouleversé la France depuis 1830. Il compte “à son passif 21 200 francs d’amendes, une condamnation à la déportation, vingt-neuf ans cinq mois de prison, cinq ans de surveillance et dix ans d’interdiction” (Rapport de police, Archives. Nationales). Mais Félix Pyat préfère l’exil aux prisons de Napoléon III..
Après la révolution de 1848, il est commissaire de la République dans le Cher. Les berrichons l'élisent à l'Assemblée constituante de 1848, où il fait, en septembre, un remarquable discours sur le droit au travail. En 1849, il est reconduit dans l'Assemblée législative. En exil à Londres, il fonde le parti "La commune révolutionnaire" et publie et diffuse de nombreux textes politiques et de théâtre.
Après la proclamation de la République le 4 septembre 1870, il rentre en France et fonde un journal.
Le 8 février 1871, il est élu à l'Assemblée nationale. En février 1871, il fonde un nouveau journal. Le 26 mars, Félix Pyat est élu au Conseil de la Commune dans le dixième arrondissement, avec 11 813 voix, en deuxième position après Ferdinand Gambon. Très populaire, il recueille des voix dans une dizaine d’arrondissements. Alors âgé de plus de soixante ans, “il était encore superbe. La taille élevée, sans la moindre velléité de se courber. La chevelure épaisse, le regard étonnamment vif, lumineux, prenant. La voix était claire, le geste large. Quel geste !” (Vuillaume. Mes Cahiers rouges).. Il fait partie de la Commission exécutive, de celle des Finances et du Comité de Salut public. Après la répression de la Commune, nouvel exil à Londres. Par contumace, le 3e conseil de guerre le condamne, le 28 mars 1873, à la peine de mort.
Il revient en France après l'amnistie de 1880 et se montre encore très actif, fait des conférences, avec Gambon, par exemple, en 1885, dans le Nivernais et à Lyon. Il se lie avec les blanquistes de Vierzon de la génération d’Édouard Vaillant et collabore aux feuilles du blanquisme vierzonnais. Il est élu sénateur du Cher en 1887 puis député des Bouches-du-Rhône en 1888.
> Félix Pyat auteur dramatique. Il est un des fondateurs de la Société des Gens de Lettres en 1838. La plupart de ses pièces (à succès), causèrent une vive émotion, aussi bien par les sujets (le peuple et sa condition, métaphores politiques) que par la forme vigoureuse, pimentée de traits satiriques, visant à l’effet théâtral ou mélodramatique, mais d'une originalité réelle et saluées par la critique. Certaines représentations furent interdites par la censure de l'époque.
Citons : Une révolution d'autrefois, ou les Romains chez eux. Théâtre de l'Odéon 1832./ Le Brigand et le philosophe. Théâtre de la Porte-Saint-Martin 1834 / Ango. Théâtre de l'Ambigu-Comique. 1835 / Les Deux Serruriers. Théâtre de la Porte Saint-Martin. 1841 / Cédric-le-Norwégien. Théâtre de l'Odéon. 1842 / Mathilde. Écrit avec avec Eugène Sue.Théâtre de la Porte Saint-Martin. 1842 / Diogène, Théâtre de l'Odéon, 1846 / Le Chiffonnier de Paris. Théâtre de la Porte Saint-Martin. 1847 / L'Homme de peine. Théâtre de l'Ambigu-Comique. 1885.
> Pyat avait un caractère entier (en 1848, il s'était battu en duel avec Proudhon), et sans doute autant d'amis que d'adversaires, et de personnes rebutées par ses déclarations enflammées et ses “effets de théâtre”. Mais Pyat possédait, en même temps qu’un style pompeux, l’art de saisir et d’exprimer la pensée populaire au moment même où elle naissait ; ainsi, s’adressant “Aux Électeurs de Paris”(1836) “Votre révolution du 18 mars a un caractère spécial qui la distingue des autres. Sa grandeur originale, c’est d’être toute populaire, toute collective, communale [...] une révolution en commandite, anonyme, unanime et pour la première fois sans gérants”.
> Un moment fort parmi d'autres dans la vie de Pyat, c’est le discours sur le droit au travail.
Le 2 novembre 1848, le député Félix Pyat propose d'ajouter au chapitre VIII du préambule de la Constitution la formule suivante : "La République doit protéger le citoyen dans sa personne, sa famille, sa religion, son droit de propriété et son droit au travail." Dans un discours très fréquemment interrompu par les conservateurs (majoritaires), il défend son amendement: "Citoyens, le vieux monde, qui pivotait sur l'injustice et la force, a toujours tenu le travail en mépris et en haine, le regardant comme un mal et une honte, comme un signe de dégradation et de châtiment réservé aux inférieurs et aux vaincus, attentatoire enfin à la dignité et à la souveraineté de l'homme libre. M. de Montalembert l'a appelé une peine, M. Guizot l'a appelé un frein, et nous, nous l'appelons un droit". Encore une formule de Félix Pyat : "Le droit au travail, c'est le droit de vivre en travaillant".
On lui doit aussi ce pastiche républicain de l'Ave Maria : Salut Marianne pleine de force, le peuple est avec toi. Le fruit de tes entrailles, la République, est béni. Sainte Marianne, délivre-nous vierge de la liberté, des rois et des papes. Ainsi soit-il.
Félix Pyat s’éteint le 3 août 1889 à l'âge de 78 ans à Saint-Gratien (Seine-et-Oise).
> Illustrations de haut en bas. Félix Pyat daprès une photo de 1871. Félix Pyat par Daumier (détail). Affiche de la conférence. Michel Pinglaut.
> La Commune de Paris, Félix Pyat. Conférence de Michel Pinglaut à 19 H 30 à l’Antidote 88 rue d’Auron à Bourges. Organisé par l’association Ki6col’.