Maurice Prêtre, de la Chapelle d'Angillon, connaît et pratique le jeu de bordé, un jeu de bûcherons, depuis trente ans. Il est aujourd'hui l'animateur des concours qui se déroulent deux fois chaque été. L'amicale des pompiers et l'association des chasseurs organisent ces rencontres populaires à la Chapelle d'Angillon, on en lit parfois le compte rendu dans la presse régionale.
Le bordé est un jeu d'adresse singulier qui s'apparente aux jeu de boules ou de pétanque, sauf qu'on joue au bordé avec des bâtons...
Un piquet est planté à onze mètres des joueurs sur un terrain de six mètres de large. Les concours se déroulent comme des concours de pétanque. Une partie réunit quatre joueurs qui s'affrontent en doublettes. Les joueurs sont munis de deux bordés qu'ils doivent lancer à tour de rôle pour les placer au plus prêt du piquet, ou tirer sur le bordé d'un adversaire pour le déloger... Les bordés sont des morceaux de charbonnette dont la section ne peut être inférieure à 3,5 centimètres, ni excéder 7 centimètres. La longueur du bordé ne peut dépasser 70 centimètres et les bois sont fournis par l'association... Les joueurs participant au concours font quatre parties de quinze points.
Maurice Prêtre : "Tous les ans il y a environ une quarantaine de participants, et maintenant, c'est nouveau : des femmes et des jeunes. Certains joueurs habitent Paris, Lyon ou le midi, j'ai même vu des Belges ! Tous les participants repartent avec un lot, mais l'équipe gagnante emporte un jambon entier ! "
"Dommage, ajoute-t-il, que les anciens ne soient plus de ce monde pour nous en dire plus car l'origine du jeu ne m'est pas bien connue. En tous cas c'était un jeu de forestiers. Je me souviens avoir vu dans ma jeunesse des gaillards emporter quelques bouteilles de vin dans les bois pour servir d'enjeu à des parties de bordé."
On peut penser que l'origine du bordé se trouve "naturellement" dans les forêts. Au dix neuvième siècle, elle recouvraient des dizaines de milliers d'hectares du Cher et de la Sologne. Et il y avait du monde qui travaillait dans ces forêts (!) : bûcherons, écorceurs, fagoteuses, fendeurs de lattes, fendeurs de merrains, scieurs de long, équarisseurs, rouliers, charbonniers, sabotiers, balaitiers... Nombre d'entre eux vivaient dans des huttes ou des cabanes durant la saison des travaux. Imaginons que, les distractions n'étant pas nombreuses, ils occupaient leurs rares moments de repos aux cartes... et au bordé. Était-ce un jeu spécifique au terroir de la Chapelle d'Angillon ? Était-il pratiqué ailleurs en Berry, en Sologne ? Nos provinces et nos villages étaient des territoires enclavés, la langue, les usages... et les jeux s'y créaient et s'y développaient un peu en vase clos. Jean-Baptiste Luron que j'ai interrogé, m'a cité le cas d'un village d'Auvergne où le jeu de quilles se pratiquait avec des bâtons. Ailleurs on devait approcher du piquet avec des fers à cheval. En somme, le bordé n'a pas encore dévoilé le mystère de ses origines.
> Alors, rendez-vous l'été prochain à La Chapelle d'Angillon pour les prochains concours de bordé !
> L'étymologie nous renseigne sur l'origine du mot berrichon bordé.
Bourdon signifie bâton, bourdon de pélerin, ou de voyageur. Bourdon compte plusieurs dérivés : bâton de pêche, perche, lance.
Bordon, en vieux français, désigne aussi le bâton de pélerin.
Le mot bourde est la contraction d'un mot plus ancien : behourde qui désignait une lance pour jouter.
Bordel, le sens originel est cabane faite de planches. Bord, signifie planche.
Bardeau, planche, tuile de bois, même origine. Et encore bardrolle, planche de coffrage.
> Si vous avez des informations, des photos, ou des souvenirs sur le jeu de bordé, n'hésitez pas, envoyez moi un mail.
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