Après l’article du journal du Conseil départemental du Cher sur le “complot" de l’agribashing, affichant sa collusion avec le lobby de la FNSEA (on attend toujours un démenti), Willy Béteau, président de l'Association de Veille Environnementale du Cher (AVEC) a écrit à Michel Autissier pour lui faire connaître une autre opinion. Cette lettre a été communiquée aux médias du Cher. Pour le cas où Le Berry Républicain oublierait d'en informer ses lecteurs, en voici le texte intégral.
Monsieur le Président,
“Stop à l’Agribashing" “Objet de nombreuses critiques de la part d’associations", un tel titre et un tel chapeau à ce dossier agriculture du dernier journal du Conseil Départemental du Cher force à réagir le citoyen et président d'une association environnementale que je suis.
Pendant quarante ans, l'écologie et ses défenseurs ont subi “l’écolobashing", sauf qu'à cette époque nous parlions français, n'étant pas tout-à-fait soumis aux lobbies agro-pharmaceutiques américains .
Nous subissions des dénigrements, des oppositions, des pressions, des intimidations, des actes malveillants et des menaces ; rappelons-nous l'époque des militants écologistes malmenés en baie de Somme, dans le sud-ouest ou en Bretagne ; souvenons-nous des locaux, bureaux, permanences d'élu.es saccagés, incendiés sans que le Pouvoir en place ne s'émeuve outre mesure.
Votre considération des associations environnementales prouve que rien n'a changé et que votre virulence reste intacte .
Voyez comment vos alliés agissent dans le sud-est de la France en appelant à perturber la sortie d'un film sur la vie des loups (agribashing ?).
Comment qualifier les lettres d'insultes, menaces de mort, intimidations et harcèlements sur les réseaux sociaux reçus par le réalisateur Jean-Michel Bertrand, le naturaliste Pierre Rigaux ou les maires ayant pris des arrêtés anti- pesticides ?
Constatez l'action de monsieur Castaner, secondé par la présidente de la FNSEA, lançant une cellule de gendarmerie appelé “Demeter” pour s'attaquer aux “actions de nature idéologique, qu'il s'agisse de simples actions symboliques de dénigrement du milieu agricole ou d'actions dures ayant des répercussions matérielles ou physiques”.
Vous rendez-vous compte que ce gouvernement entend museler l'expression d'associations par la force de la gendarmerie et que vous abondez dans ce sens en voulant stopper les “nombreuses critiques de la part d’associations" ?
Lisez, monsieur le Président, les écrits de la Confédération Paysanne, vous y découvrirez que ces paysans ne se sentent pas concernés par cet “agribashing”, qu'ils ont bien ciblé l'origine de ce concept et qu'il ne faut pas confondre une profession, un métier et un système politico-économique.
En effet, nos associations ne se trompent pas de cible : elles ne “dénigrent pas le milieu agricole” (cit. monsieur Castaner), elles ne “critiquent pas le secteur agricole” (cit. CD du Cher), elles dénoncent des pratiques condamnées par l'expérience scientifique de nombreux chercheurs de renom (Séralini, Dufumier, Claude et Lydia Bourguignon, pour ne citer qu'eux) .
Elles ne s'en prennent absolument pas aux paysans, pas plus qu'aux agriculteurs pris au piège des banques et des firmes qui les ont rendu dépendants des pesticides et de pratiques mortifères (sols, air, eau, biodiversité, santé).
Nos “actions idéologiques” , pour reprendre le discours de monsieur Castaner auquel vous adhérez en parlant de “nombreuses critiques de la part d’associations", veulent peser démocratiquement de tout leur poids pour que, face au changement climatique, au développement des cancers professionnels, à l'augmentation inexorable de l'emploi des pesticides ( + 24% entre 2017 et 2018), nos élus aient enfin le courage de prendre des décisions qui sont dictées par l'urgence et qu'ils influent efficacement sur les changements de paradigmes nécessaires à l'amélioration des désastres non endigués mais reconnus par les différentes COP impuissantes.
Non, ce n'est pas en favorisant les fermes-usines, en puisant toujours davantage dans la ressource en eau, en augmentant l'emploi des pesticides, en détournant le métier de paysan de ses fondamentaux, que vous pourrez mettre en œuvre le développement durable, la transition énergétique, le retour de la biodiversité, le bon état écologique des rivières,...; vocabulaire dont vous vous emparez parfois dans certaines circonstances .
Il existe pourtant de multiples exemples et pléthore d'études qui pourraient vous démontrer que vouloir changer un modèle agricole à bout de souffle n'est pas de l'agribashing, mais simplement le seul moyen de réussir à sauver ce qui peut encore l'être.
Soyez assuré, monsieur le Président que nos associations environnementales ne sont pas ce qu'on vous dit quelles sont .
Je vous prie d'accepter, monsieur le Président, l'expression de mes respectueuses salutations .
Willy Béteau.
Président de l'Association de Veille Environnementale du Cher.
> Lire dans gilblog : Agribashing. Le Conseil départemental du Cher s’en mêle ! >>> Lien.