Pour le gouvernement et le bétonneur Vinci, il faut absolument construire le nouvel aéroport de Notre Dame des Landes, plutôt qu’agrandir l’aéroport existant de Nantes Atlantique. En effet, selon le discours officiel, rallonger les pistes mettrait en péril le lac de Grand Lieu, une réserve naturelle située en bout de piste.
Le premier ministre, Manuel Valls, avec des trémolos écologiques dans la voix lance cette formule définitive le 4 novembre 2015 devant l’Assemblée Nationale : “L’actuel aéroport est au contact de trois zones Natura 2000, il n’est donc pas souhaitable de l’étendre. Si on veut être cohérent avec le rendez-vous de la COP21, alors il faut poursuivre les travaux !”
Mais remontons un peu en arrière. En 2014, Henri-Michel Comet, le Préfet de région demande aux experts de la Direction régionale de l’environnement des Pays de Loire (DREAL) des analyses et un rapport sur l’impact d’une extension de la piste de Nantes Atlantique. Le rapport lui est remis le 10 septembre de la même année, signé par le chef de département, Xavier Hindermeyer. Puis silence, motus et discrétion - le Préfet enterre le rapport.
Et soudain, bardadas ! Le“Canard enchaîné” du 17 février 2016 révèle que la réserve naturelle du Grand Lieu ne serait pas en péril si l'actuel aéroport de Nantes-Atlantique devait être agrandi ! C’est en effet ce que dit le fameux rapport de la DREAL du 10 septembre 2014. Un rapport que le Préfet a dissimulé et que Manuel Valls a feint d’ignorer lors de son discours devant les députés le 4 novembre 2015 ! Les arguments du pouvoir et de Vinci ne valent pas un pet de rainette de zone humide…
Pour France Nature Environnement (FNE), "le rapport de la DREAL confirme l'analyse des associations : c'est bien le transfert de l'aéroport vers Notre-Dame-des-Landes et non son réaménagement qui risque de porter atteinte à la faune du lac de Grand-Lieu en augmentant la pression foncière à ses bords. Rappelons en outre qu'il détruira plusieurs centaines d'hectares de zones humides".
France Nature Environnement avait écrit au préfet de Loire-Atlantique en mars 2015 en lui demandant de transmettre tous les rapports réalisés “quant aux incidences environnementales possibles d'un tel réaménagement". Mais le rapport de la DREAL ne lui a jamais été communiqué. L’association en conclut que le rapport “a donc été dissimulé par la préfecture”.
“La dissimulation qui a été faite de ce document est insupportable et inacceptable !” estime Denez L’Hostis, président de France Nature Environnement. “Elle confirme que ce dossier d’aéroport a été instruit dans la plus grande opacité, si bien que les différentes phases de concertation avec le public n’ont jamais été que poudre aux yeux. Combien d’autres analyses défavorables au projet sont encore gardées secrètes par l’État ? Nous exigeons que tous les documents utiles à la compréhension du dossier soient enfin mis sur la table. L’hypothétique référendum à venir ne saurait être organisé sur le fondement d’un mensonge d’État”.
Et que dit le fameux rapport “secret” de la DREAL ? Selon les extraits publiés par le Canard Enchaîné, une activité un peu plus intense de l’aéroport de Nantes “ne sera pas perceptible par la faune du lac et ne génèrera pas de perturbations”. Pire, les experts ont conclu que c’est plutôt le “déménagement à notre Dame des Landes, l’urbanisation de ces terres qui seraient préjudiciables aux équilibres écologiques de la réserve”.
Et pour corser le tout, voici une nouvelle qui tombe …comme un cheveu dans une soupe froide de garbure Nantaise ! Loïc Marion, directeur de la Réserve naturelle du lac de Grand Lieu, a écrit au premier ministre le 28 octobre 2015. "Je n'ai jamais constaté la moindre gêne des oiseaux de ce lac due aux avions utilisant l'aéroport actuel de Nantes Atlantique. Tout au contraire, l'abandon de Nantes Atlantique constitue une menace bien réelle pour le lac de GrandLieu, dans la mesure où ses périmètres de protection (réserve naturelle, site classé Natura 2000) ont été définis au plus juste près du lac, en tenant compte de la protection de fait assurée par le périmètre de protection antibruit de l'aéroport. Le déplacement de l’aéroport mettrait fin à cette protection, et des élus locaux n’attendent d'ailleurs que cette issue pour pouvoir urbaniser tout ou partie de ce corridor.” Urbaniser, le mot vous dit quelque chose ? Voilà sans doute pourquoi le Préfet a enterré le dossier de la DREAL. Voila pourquoi Manuel Valls a ignoré ce courrier le 4 novembre 2015 dans son discours à l’Assemblée Nationale. En effet, l’agrandissement de la zone urbaine de Nantes est à ce prix : le prix du silence ….Ou plutôt le prix de l’immobilier !
Malgré l’annonce par François Hollande d’un prochain référendum local, les opposants au projet et partisans du maintien de l’aéroport actuel, demandent toujours la réalisation d’une étude indépendante pour l’optimisation de Nantes-Atlantique. Mais la demande a sans doute été oubliée dans le même tiroir que le rapport de la DREAL….
Et ça n’est pas tout… Le gouvernement claironne les promesses d'emploi pour "vendre" le projet aux citoyens crédules…..Mais en réalité c’est le contraire, si le projet de nouvel aéroport est important par rapport à l’infrastructure actuelle, il est sous-dimensionné pour certains points. Par exemple : tandis que les halls d’arrivées et de départs occupent 4 200 mètres carrés à Nantes-Atlantique, ils n’occuperont que 2 600 mètres carrés à Notre Dame des Landes. Car le nouvel aéroport “a été pensé pour réduire le nombre d’emplois, avec moins de passerelles d’embarquement, moins de guichets d’enregistrement. Sa conception le rapproche d’un aéroport low cost”. Le nombre d’emplois créés par million de passagers y serait plus proche des 250 que de 600 comme annoncé, révèlent les opposants au projet. Un nouvel aéroport, des sommes énormes dépensées, le bétonnage d’un territoire agricole et d’espaces naturels, et tout ça pour faire des économies de personnel !
Les contestataires ont traduit les chiffres de Vinci en équivalent temps plein : 750 emplois, si l’on estime la durée des travaux à quatre ans. Des emplois provisoires qui seront limités à la durée du chantier, potentiellement précaires et mal rémunérés. On sait que le recours à la sous-traitance, au travail détaché bon marché et au travail illégal, sont monnaie courante sur ces grands chantiers…
Et ne parlons pas des emplois agricoles. Au minimum 40 exploitations seraient touchées. Le nouvel aéroport aurait également un impact négatif sur l’activité de ceux de Rennes et d’Angers, déjà bien à la peine.
Le simple citoyen peut s’interroger à bon droit : quelles sont les raisons de cette obstination absurde du pouvoir ? Pourquoi persévère-t-il dans l’erreur ? Quels sont les arrangements entre Vinci et les décideurs politiques ? Les esprits soupçonneux ne vont pas manquer d’imaginer de la combine dans l’air…..
Ma conclusion (tant pis si ça fait un peu solennel), prendra la forme d’une paraphrase de Hannah Arendt : Des nations entières peuvent s'orienter d'après un tissu de tromperies avec lesquelles les dirigeants s’emploient à soumettre leurs peuples. L’affaire du projet d’aéroport de Notre Dame des Landes en est un exemple.
> Cliquer sur les images de la page du “Canard enchaîné” et de la lettre de la DREAL pour les agrandir.
> Sources. Le Canard enchaîné 17 février 2016.
UP mag. Notre-Dame des Landes : un rapport caché pointe des impacts écologiques. >>> Lien.
NDDL : les dissimulations inacceptables de l’État. France Nature environnement. >>> Lien.
20 minutes. Un rapport caché conforte les opposants à Notre-Dame-des-Landes. >>> Lien.
Reporterre. Notre-Dame des Landes : Manuel Valls a menti >>> Lien.