“Philémon, vieux de la vieille”, de Lucien Descaves.

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Le roman Philémon Vieux de la vieille raconte les souvenirs d’un couple d'amoureux aux cheveux blancs surnommés “Philémon et Baucis”, par le narrateur. Ce dernier, intrigué par leur discrétion et attiré par les chants qui s’échappent de chez eux, décide de faire connaissance et d’en apprendre davantage. Il observe ses voisins, accumule des indices qui s’assemblent, et leur histoire s'écrit peu à peu. Au fil des conversations et des visites, il découvre que Colomès et sa femme Phonsine sont d’anciens communards de retour d’exil. Ainsi, Lucien Descaves nous fait découvrir l’histoire des proscrits de la Commune, en particulier ceux installés à Genève pour fuir la répression versaillaise, comme nos deux amoureux. À travers les discussions des personnages, Descaves ressuscite les fantômes de 1871 et le réseau des exilés. S’il montre une sympathie évidente pour les révoltés sacrifiés par le gouvernement de Thiers, il se garde de toute leçon de morale politique ou idéologique. On est dans le romanesque et dans l’Histoire.

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Dans son roman, Lucien Descaves brosse le portrait ou évoque le sort de plusieurs communards exilés, des plus obscurs aux plus célèbres, tels Gustave Courbet, Ferdinand Gambon et Élisée Reclus. Le personnage principal est un “vieux de la vieille” (comme il se nomme), en effet le personnage de Philémon/Colomès, son héros, est inspiré de la figure de Gustave Lefrançais et d’un autre communeux moins connu : Henri Mathey qui dut s’exiler, fut bijoutier (ouvrier en bijoux) à Genève et condamné à la déportation dans une enceinte fortifiée. Henry Mathey, un ami de Félix Pyat, voila qui nous rapproche du Berry…

Pendant le Siège de Paris, Mathey est simple garde à la 8e compagnie du 86e bataillon de la Garde nationale. Sous la Commune, se rendant à l’Hôtel de Ville pour voir Félix Pyat, son ami intime, il rencontre Édouard Vaillant et Henri Brissac, qui lui enjoignent de prendre le commandement du fort de Vanves. Pendant la Semaine sanglante, il participe à la guerre des rues contre les versaillais et parvient à prendre la fuite malgré une blessure. Le 18 septembre 1872, le 5e conseil de guerre le condamne par contumace à la déportation dans une enceinte fortifiée. 
De retour en France, après son exil à Genève il signe le 18 mai 1885, dans
La France libre, l’appel d’un comité de souscription annonçant le projet de publication des Cahiers du peuple de Félix Pyat. Après la mort de ce dernier, dont il est l’exécuteur testamentaire, il hérite des droits sur le théâtre de Pyat et des manuscrits de pièces inédites.

Mais revenons au livre... Sensible et loyal, Descaves veut dans ce roman, rendre hommage aux hommes et aux femmes qui ont vu et fait la dernière des révolutions françaises et dans l’intimité desquels il a vécu. Philémon est une œuvre vivante sur leurs années d’exil et leur difficile retour, où percent la tendresse et l’affection de l’auteur, où s’exprime une émotion sobre et juste. Il sait restituer avec vérité ce que fut un communard, figure attachante et bien différente de la caricature anachronique peuplant l’imaginaire collectif.

Les qualités romanesques de Philémon ne sont pas amoindries par la précision des faits recherchée par Descaves. Grâce aux moyens propres à l’écriture (comme les dialogues, la part donnée à l’émotion), l’auteur raconte deux vies attachantes dans un événement majeur de la IIIe République et de l’histoire du mouvement ouvrier.

Cette récente réédition rajeunit le roman de Descaves (qui n’avait pas été réimprimé depuis 1922, je crois), le texte présenté, établi et annoté par l’historien Maxime Jourdan, et la présentation soignée, en font un livre qui enrichira votre bibliothèqueJ’emprunte la conclusion à Michèle Audin, pour qui “rares sont les ouvrages qui allient l’exactitude historique à l’agrément que procure la lecture d’un bon roman. Assurément, Philémon est de ceux-là”.

> Lucien Descaves, romancier, dramaturge et historien, est né en 1861. Il est connu pour être l’un des membres fondateurs de l’Académie Goncourt dont il sera président à la fin de sa carrière. C’est en faisant paraître Sous-Offs en 1889, brûlot antimilitariste, qu’il accède à une renommée nationale. Proche des libertaires il prend la défense du capitaine Dreyfus. Auteur de plusieurs dizaines d’ouvrages, passionné par la Commune, il publie deux romans traitant de son histoire et de son souvenir : La Colonne en 1901, puis Philémon, Vieux de la Vieille en 1913. Il décède en 1949.

> Sources. 
Julie Moucheron. Lectures.
>>> Lien. 
Dictionnaire Maitron. Philémon, vieux de la vieille. >>> Lien. 
Michèle Audin. Ma Commune de Paris. Philémon, vieux de la vieille, de Lucien Descaves. >>> Lien.

> Philémon, Vieux de la Vieille. Roman de la Commune, par Lucien Descaves. Éditions La Découverte. Texte présenté, établi et annoté par Maxime Jourdan. Un livre broché de 343 pages. Format 15X24 centimètres. Prix 22 euros. En vente à La Poterne 41 rue Moyenne et Point virgule 46 rue d’Auron à Bourges, et dans les bonnes librairies.







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