Flore Berlingen, directrice de l’association Zero Waste France publie le livre ”Recyclage, le grand enfumage”. Elle y démonte la stratégie affichée du tout recyclage pour résoudre la crise des déchets, car pour l’auteur, le recyclage est devenu l'alibi du jetable. Le recyclage permet de ne pas remettre en question le jetable et les intérêts économiques qui lui sont liés, et surtout de cacher le gâchis de la surproduction qu’il révèle.
Ce n’est pas au recyclage en tant que tel auquel je m’attaque dit Flore Berlingen dans une interview publiée par Natura Sciences, je dénonce l’instrumentalisation du recyclage. Le recyclage est indispensable, mais insuffisant et parfois même contre-productif. Les industriels prétendent vouloir recycler des produits qui ne devraient même pas exister : les objets à usage unique. En réalité, même triés, une grande partie d’entre eux ne sont pas recyclés ! Les industriels cherchent à faire croire que grâce au recyclage ce type de consommation peut devenir soutenable. Ce qui est un mensonge, conclut-elle.
Pour Flore Berlingen, l’enfumage c’est lorsque le recyclage, son objectif ou son discours dissimule quelque chose que l’on ne veut pas montrer au public. Le recyclage est instrumentalisé à des fins de marketing. Il sert alors d’argument de vente pour nous pousser à acheter plus, à renouveler plus fréquemment nos achats. C’est par exemple le cas lorsque des marques offrent des bons d’achats en échange de vêtements rapportés pour du recyclage. Les grandes enseignes de mode le font quasiment toutes aujourd’hui.
Il y a aussi des cas de mensonge caractérisés lorsque le caractère recyclable est mis en avant sur l’emballage, alors qu’il n’y a pas de recyclage effectif en fin de parcours. Le recyclage devient l’instrument des lobbies pour éviter des réglementations contraignantes qui s’attaqueraient au jetable. Ils veulent éviter que le législateur s’empare du sujet et s’attaque aux objets à usage unique qui posent problème.
Dans un contexte de surconsommation des ressources et d’explosion de la quantité de nos déchets, le recyclage apparaît comme une panacée face à l’hérésie de la mise en décharge ou de l’incinération. Nous voudrions croire aux vertus d’un système qui nous permettrait de continuer à consommer comme si de rien n’était, en faisant juste l’effort de trier. Les campagnes de communication des acteurs publics ou privés entretiennent ce mirage, en faisant l’impasse sur les limites du recyclage.
> Petit commentaire de gilblog. Avez vous remarqué que les médias nous assènent des chiffres astronomiques, mais toujours détachés de leur contexte. Du coup, on n’y comprend rien. Cette méthode de sidération du public permet d’éviter d’informer véritablement les citoyens. Démonstration avec une statistique pas toute fraîche, mais qui donne des ordres de grandeur. Vous noterez que la propagande pour le tri sélectif et le recyclage met la responsabilité du gâchis sur le dos des familles alors qu’elles n’y sont que pour 10 %.
Statistiques, en 2014 les déchets en France atteignaient 325 millions de tonnes (MT). Ménages 31 MT, 9,50%. Travaux publics 185 MT, 56,90%. Bâtiment 42 MT, 12,90%. Agriculture, industrie et collectivités 67 MT, 20,60% (Une part des déchets agricoles sont considérés comme fertilisants et non comme déchets). Enfin, rappelons que la France est aussi l'un des pays au monde qui a le plus de déchets nucléaires sur son territoire.
> Recyclage : le grand enfumage, par Flore Berlingen. Éditions Rue de l’échiquier. Un livre broché de 128 pages. Format : 14 X 21 centimètres. Prix 10 euros.