Les nouvelles histoires de Berlaudiot.
Berlaudiot est à la recherche de champignons dans le bois de La Charnivolle. Il est tellement absorbé par sa cueillette qu’il n’entend pas venir un gars derrière lui. Et v’l’a ti pas que le gars lui donne un coup sur la nuque qui l’assomme à moitié.
L’assommeur, un sapré grand gaillard, c’est Antoine Rouzeau, dit Grand bouc - eul’ fils à Robert Rouzeau le bûcheron, dit Bouc des bois.
Du coup, Berlaudiot, il en est tout éberlobé. Y s’sent coum’ s’il avait du fromage mou collé aux méninges. T’es ti pas fou deum’ gueugner coum’ ça, j’on manqué m’abouaquer ! dit-il en reprenant ses esprits. T’aurais pu m’assommer anc’ ton battoir. Tu connais ti pas ta force ?! C’est tout d’mêm’ pas des manières d’bûcher coum’ eun’ brute sul’ monde !!!
Grand bouc, s’excuse à peine et répond avec insolence : Bin, j’eum’ suis seu’ment trompé d’gars, j’croyais qu’tétais mon copain Antoine “nez d’chat”. Ya pas d’quoué en fée eun' montagne ! C’est ti qu’tu s’rais d’venu chicanier, Berlaudiot ?!.
Mais Berlaudiot est fâché coum’ eun’ talune, il n’entend pas laisser l’offense impunie.
Pinçant l’oreille de l’insolent il le traine devant le maire, Paul-Émile Grosbois (qu’est aussi l’notaire de La Charnivolle).
Le maire écoute les deux parties avec une impartialité apparente. Apparente seulement, car Berlaudiot oublie que le maire est le parrain de Grand bouc.…
Mon cher Berlaudiot, dit-il. Je comprends parfaitement ce que vous ressentez. Quiconque, en de pareilles circonstances, ressentirait la même chose. Que diriez-vous si je vous permettais de lui donner une tape à votre tour ? Vous sentiriez vous indemnisé ?
Non ! Je s’rais pas satisfait anc’ ça ! dit Berlaudiot. C’gars là y connaît point sa force, y m’aurait décollé l’crâne ! En plus d’un bon coup su’ la tête, faut y donner eun’ contravention, eun’ amend’ et pi un pévé par eul’ gendarm’ !!!
Bien, dit le maire. Ayant dûment délibéré sur les différents aspects du cas, et en mon for intérieur, je dresse contravention et je condamne Antoine Rouzeau à une amende de dix euros, qu’il payera à Berlaudiot sur le champ.
Antoine, va chercher le montant de cette contravention immédiatement ! dit-il au grand dépandleux d’andouilles.
Berlaudiot s’assied et attend le retour du gars. Une heure passe, puis deux heures, mais toujours aucun signe de Grand bouc. Et pendant ce temps là, le lien entre Grosbois et Grand bouc lui revient en mémoire…
Quand arrive l’heure de fermer la mairie, Berlaudiot choisit le moment où le maire lui tourne le dos et lui donne une claque sur la nuque, si forte que la mairie en résonne encore.
Désolé, j’peux pas attendre pus longtemps, m’sieur l’maire, dit Berlaudiot. Quand l’Antoine y r’viendra, vous z-y direz qu’y vous paye l’amende de dix euros directement !
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