J'ai connu en 1976 un Dominique Ester de Menetou-Salon…

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Apprenant le décès de Prosper, Alain Mathias, qui l’a connu il y a bien longtemps, m’envoie ces souvenirs que je partage aussitôt avec les lectrices et lecteurs de gilblog…

J’ai connu en 1976 Dominique Ester de Menetou-Salon à l'hôpital Percy. Nous avons sympathisé, et ce passage à l’hôpital est resté un moment important pour moi. Je regardais de temps en temps sur le net si je trouvais trace de lui (comme pour d'autres camarades). Je viens de tomber sur l'annonce de son décès en novembre 2020 et j'aimerais savoir s'il s'agit bien de la personne que j'ai connue. En lisant votre article sur La borne mon village/Prosper, ça semble bien être le cas... Voici tous les souvenirs de Dominique qui me restent des quatre mois que nous avons passé ensemble.

Suite à un grave problème pulmonaire survenu en Centrafrique (où j'effectuais un service civil), je suis arrivé à l'hôpital Percy entre Noël 1976 et Nouvel An 1977.

La troisième ou quatrième nuit de mon hospitalisation,  un hurluberlu est venu dans ma chambre en poussant des cris et des proférant des insanités. Étant immobilisé dans mon lit, je n'en menais pas large... Dominique est intervenu pour le faire partir. J'ai été très surpris de son efficacité toute dans le calme. Il est venu me voir les jours suivants pour discuter et on a vite sympathisé.

J'ai dû subir ensuite une intervention chirurgicale et, à mon retour, il m'a proposé de partager sa chambre.

Dominique avait eu un très grave accident de voiture. Il était chargé de la surveillance et l'entretien de différents relais sur je ne sais plus quelle île du Pacifique. Il a montré le travail à son remplaçant et le jour où il lui a laissé l'entière responsabilité du circuit, ce dernier a perdu le contrôle du véhicule et a quitté la route. Dominique a été laissé dans un état désespéré, l'Armée a payé le voyage à sa mère pour qu'elle puisse le voir avant qu'il ne meure... Entretemps, un jeune chirurgien a entrepris une opération de la dernière chance, en "raccommodant" les poumons avec du plastique... L'opération a réussi et dès que Dominique est devenu transportable, il a été rapatrié sur Percy.

Quand je suis arrivé à Percy, il devait y être depuis 6 mois et il avait déjà subi plusieurs opérations (six ou sept ?). Il y avait donc un certain nombre d'habitudes, de services et de tolérances. Il ne voulait pas partager sa chambre, car les soins étaient assez lourds et il ne voulait pas imposer cela à un camarade. Sa proposition de partager sa chambre (très grande!) était une faveur.

Lorsqu'un hospitalisé avait une crise d'anxiété ou de crainte sur son avenir, Dominique était systématiquement appelé par les infirmières pour le rassuré.

Nous (j'ai fait tout de suite partie de son équipe) étions régulièrement utilisés pour conduire des malades aux examens, transporter des documents d'un service à un autre ou d'autres services semblables.

Je dois aussi avouer d'autres actions moins glorieuses. Le geste médical craint de tous était l'intubation. Le soir, quand nous recevions les médicaments, un cachet bleu (tranquillisant) était distribué à ceux qui devaient subir une intubation le lendemain. Il nous est arrivé de mettre ce petit cachet bleu dans la coupelle d'un malade qui n'avait pas d'intubation de prévue (ni réalisée bien sûr).

La nourriture. Le premier mois passé avec lui, j'ai pris 14 kg (lui quelque chose de semblable). Il avait toujours du Menetou-Salon blanc et des crottins de Chavignol, j'avais plutôt du chocolat et d'autres fromages. Les repas : petit-déjeuner copieux le matin, repas commun le midi puis supplément attribué par la diététicienne (sympa mais ne tenait pas son rôle), goûter à 4 h, repas du soir et un œuf sur le plat (ou autre) sur le coup de minuit (on avait la clé de la cuisine des infirmiers). Les infirmières et médecins venaient régulièrement passer leur pause "chez nous", pour boire un pot ou croquer du chocolat.

Nous faisions beaucoup de parties de tarot. Le mercredi, nous faisions la course de celui qui terminerait les mots-croisés du Canard enchaîné en premier. Il gagnait presque toujours.

Les médecins ont voulu le renvoyer plusieurs fois "dans ses foyers", mais il a toujours refusé. Il pensait qu'en retrouvant ses copains à Menetou-Salon il serait trop souvent en foire et que ce n'était pas sérieux pour sa santé.

On a voulu aussi me renvoyer dans mes foyers fin mars, mais, comme on avait prévu des activités pour le 1er avril, j'ai refusé. Nous sommes sortis pour la première fois en ville pour faire nos courses du 1er avril. C'est là qu'on s'est rendu-compte qu'on avait grossi et on a mis des ficelles à nos pantalons qui ne fermaient plus...

J'ai quitté l'hôpital début avril et je ne sais pas pourquoi nous n'avons pas échangé nos adresses. Mais je pense qu'il a été transféré à la clinique du Val d'Or à Saint-Cloud pour une énième opération.

J'ai dû rencontrer sa famille une fois ou l'autre, en particulier un oncle dans la Marine, mais, évidemment, lors de visites nous laissions l'autre seul, si bien que je n’ai rien gardé en mémoire.

Ça m'a fait du bien d’évoquer ce passé. En tous cas, je garde le souvenir  de Dominique, un homme original et bon.

Alain Mathias



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