À la majorité, les élus du Conseil général du Cher refusent la réduction des recettes publiques et se prononcent pour un audit de la dette. Mais Le Berry républicain (devenu seul quotidien local du Cher) n'a pas jugé cette événement intéressant pour ses lecteurs ! Pour ce journal, c'est sans doute ce qui s'appelle informer. Pour compenser un peu, voici le texte intégral voté par la majorité des élus du Conseil général (on imagine que les élus UMP étaient contre).
> Selon les experts et éditorialistes libéraux, adeptes de la pensée unique, la France "vit depuis plus de trente ans à crédit".
Si les déficits et la dette ont flambé, ce n’est pas du fait d’une envolée des dépenses, mais à cause d’une diminution des recettes. Le manque à gagner annuel dû aux exonérations et baisses d’impôts consenties aux plus riches dans les années 2000 est chiffré par Gilles Carrez, député UMP et rapporteur du budget, à plus de 100 milliards d’euros. Et la crise financière a provoqué une chute brutale des recettes publiques déjà érodées par cette contre-révolution fiscale. Cette dette est celle de la finance et du néolibéralisme, pas celle des assurés sociaux ni des citoyens.
Car aujourd’hui à qui profite de l’austérité ? Pourquoi les États sont-ils obligés de s’endetter auprès des marchés financiers et des banques, alors que celles-ci pourraient emprunter directement et pour moins cher à la Banque centrale européenne ?
Pour rappel, depuis 1973, une loi (Giscard-Pompidou) ne permet plus à l’Etat français d’emprunter, à faible taux, à la banque centrale, il doit emprunter aux banques privées. Après le "non" du peuple de France au référendum sur le traité constitutionnel européen de 2005, c’est avec le traité de Lisbonne (voté en Congrès à Versailles) que ce système est maintenant imposé partout en Europe.
La zone euro a été conçue pour éliminer les politiques économiques volontaristes et placer les Etats sous l’égide des marchés : concurrence libre et non faussée ; réduction des recettes publiques pour augmenter la compétitivité ; obligation faite aux Etats, en cas de déficits, de se financer sur les marchés ; interdiction faite aux Etats de s’entraider financièrement…
Écoles, hôpitaux, hébergement d’urgence… retraites, chômage, culture, environnement… nous vivons tous au quotidien l’austérité budgétaire et le pire est à venir. "Nous vivons au-dessus de nos moyens", telle est la rengaine que l’on nous ressasse dans les grands médias.
Le Conseil Général du Cher, à l’instar du Collectif "pour un audit citoyen de la dette publique", lancé mi-octobre 2011 par des personnalités et nombre d’organisations syndicales, associatives et politiques, refuse ces discours culpabilisateurs. Nous ne voulons pas assister en spectateurs à la remise en cause de tout ce qui rendait encore vivables nos sociétés, en France et en Europe.
C’est pourquoi le Conseil général du Cher s’associe à la demande de celles et ceux qui "refusent que ces questions soient évacuées ou traitées dans notre dos par les experts officiels sous influence des lobbies économiques et financiers". Comme eux, "nous voulons y répondre nous-mêmes dans le cadre d’un vaste débat démocratique qui décidera de notre avenir commun". En fin de compte, ne sommes-nous plus que des jouets entre les mains des actionnaires, des spéculateurs et des créanciers, ou bien encore des citoyens, capables de délibérer ensemble de notre avenir ?
Nous souhaitons que soit engagé un débat qui nous mobilise dans notre département, dans nos villes, nos quartiers, nos villages, nos lieux de travail, et que soit lancé un vaste audit citoyen de la dette publique.
C’est pourquoi, le Conseil général du Cher :
Affirme publiquement que sa politique d’endettement est mise exclusivement au service de l’amélioration des conditions de vie de tous ses concitoyens et rejette toute forme d’endettement à caractère spéculatif ;
Décide de ne contracter que des prêts classiques à taux fixe ou à taux révisable, avec des marges et des conditions de sortie correctes ;
Demande solennellement aux autorités de l’Etat de mettre en demeure les banques de transformer les prêts "toxiques" en prêts classiques, sans surcoût, sans soulte, sans allongement de durée et sans clause léonine ou abusive, les banques devant supporter la totalité des surcoûts que leurs produits ont générés pour les emprunteurs ;
Demande à l’Etat de mettre en place un véritable service public de financement des collectivités locales ;
Approuve la démarche du Collectif pour un audit citoyen de la dette publique, avec lequel il coopérera, pour montrer les dégâts provoqués par les pratiques financières de ces dernières années et lancer un vaste débat public sur la question.
> Voté par la majorité des élus du Conseil général du Cher (groupe Socialiste et Divers Gauche et groupe Communiste-Front de Gauche), lors de la session du 6 février 2012. Le groupe UMP-Divers droite a refusé de prendre part au vote et a quitté la salle - à l'exception de Henri Pain, élu du canton de Dun sur Auron, qui s'est abstenu.