En avril 2016, après s'être présentée aux guichets de la préfecture du Cher pour solliciter son admission, une demandeuse d'asile de nationalité guinéenne n'avait pu obtenir un hébergement et se voyait contrainte de dormir dans la rue avec sa fille. Saisi par une association, le juge des référés avait estimé : "tant la condition de l'urgence que celle de l'atteinte grave et manifestement illégale à la liberté fondamentale que constitue le droit d’asile, apparaissent établies” et donné injonction à la Préfecture de fournir un hébergement.
Dans une déclaration, le Comité de vigilance du Cher pour la défense des droits des étrangers, se demandait "si la préfecture doit attendre systématiquement de se faire condamner par le tribunal pour mettre sous sa protection des personnes que le droit français lui enjoint de protéger ? ”
Neuf mois plus tard, on est toujours en droit de s’interroger.
En effet, depuis cinq semaines de décembre et janvier, des associations, de simples citoyens organisés pour la circonstance en collectif, ouvrent leur porte le soir, à des réfugiés ou demandeurs d’asile. "Nous les trouvons dans un état d'épuisement physique et moral parfois impressionnant, dit le collectif Codac : parmi eux des femmes isolées, un mineur malade, des couples… La nuit du lundi 2 janvier 2017 au mardi 3 janvier une femme de vingt-six ans se retrouvait pour la troisième fois en deux mois sans hébergement, malgré ses appels au 115. Et ce malgré une température glaciale (moins trois degrés), bien qu'elle soit une femme seule dans les rues et après qu'elle se soit présentée à l'accueil de nuit dans l'attente d'un désistement ou d'une solution de dernière minute. Récupérée “in extremis” à 21h45 par un berruyer du Codac elle avait été mise à l'abri pour la nuit".
Pour l’association, les soirs se suivent et se ressemblent : dans la nuit du mardi 3 janvier au mercredi 4 janvier, une femme isolée et un mineur étaient sans hébergement devant l’accueil de nuit malgré leurs appels au 115. “En grand danger du fait de la température et de leur vulnérabilité ces personnes ont été mises à l’abri par des citoyens".
Dans un communiqué de presse, le Codac déclare : “Notre rôle n’est en aucun cas de nous substituer à l’État défaillant, après avoir porté assistance à des personnes en danger et en détresse pendant cinq semaines”, et le collectif demande une réponse “rapide et pérenne à une situation choquante et illégale.”
On se souvient des déclarations de la Préfète assurant dans Le Berry Républicain (26 décembre 2016) que quiconque solliciterait un hébergement d’urgence serait pris en charge, s’il se manifestait. "Des places sur Bourges, il y en a suffisamment pour héberger tous ceux qui en ont besoin”.
Cependant, au cours des derniers mois, suite aux interventions d’une autre association, et à dix-sept reprises, le juge des référés a enjoint la Préfecture de fournir des hébergements adaptés à autant de personnes (!), déclarent des bénévoles du Codac.
Tout cela confirme le manque d’hébergements d’urgence dans notre département que déplorait la Coordination du Berry pour le droit d’asile, le 20 décembre dernier. À l’époque Fabrice Rosay, secrétaire général de la Préfecture, affirmait être prêt à recevoir à nouveau les représentants de la Coordination et produisait les statistiques de prise en charge, le nombre de places et le budget pour tenter de démontrer l’efficacité des pouvoirs publics (Le Berry Républicain du 21 décembre 2016). Malheureusement, malgré cet effet d’annonce et la visite de la Préfète dans un centre d’accueil à Noël (complaisamment relatée par le journal local), le dispositif d’hébergement d’urgence reste insuffisant, ce que la Coordination a eu l’occasion de répéter lors d’un rendez-vous à la Préfecture le 29 décembre.
Pourtant, insiste le Codac, il existe une “obligation inconditionnelle et immédiate de procurer un abri de nuit à celui qui s’en trouve privé” (Directive ministérielle, circulaire DGCS/1A/2010/271 du 16 juillet 2010). Il y a de nombreux logements vides à Bourges. Il existe des solutions alternatives non utilisées : nuits d'hôtel ou à l'auberge de jeunesse. Et Fabrice Rosay, déclarait le 29 décembre 2016 qu'il "n'hésitera pas un quart de seconde à donner, par grand froid, une chambre d'hôtel à celui dont la vie ou la santé serait menacée, s'il en avait connaissance.”
Apparemment, en ce début 2017 la Préfecture du Cher n’a pas encore toute sa connaissance….
Et ça se passe à Bourges, en France au vingt et unième siècle. Heureusement, certains ont à cœur de secourir leurs semblables.
> Sources : France 3 régions/AFP 26/04/2016. Le Berry Républicain 21/12/2016, 25/12/2016, 31/12/2016, 03/01/2017.
> Définition du Référé liberté. >>> Lien.
> La Coordination du Berry pour le droit d’asile regroupe des associations (Secours catholique, Emmaüs, Comité de vigilance 18) et des particuliers. Courriel : coordinationberrymigrants@gmail.com Site web. >>> Lien
Le CODAC (Collectif On Dort Au Chaud). Contact : codacbourges@yahoo.com
Le Comité de vigilance du Cher pour la défense des droits des étrangers. Site web : >>> Lien