En France, de nombreuses rues et bâtiments publics portent son nom, mais si ces traces d’Édouard Vaillant sont toujours présentes, l’homme et son action sont un peu oubliés, notamment dans son propre département. Pourtant Édouard Vaillant (1840-1915) n’est pas un personnage historique anodin. C’est un socialiste des origines (rien à voir avec le parti “socialiste” d’aujourd’hui), ce qui le rend aujourd’hui un peu dérangeant. Personnage central du socialisme français (il était considéré comme le troisième homme du socialisme avec Jean Jaurès et Jules Guesde), membre de la Commune de Paris, Vaillant associe l’héritage blanquiste au marxisme et prône une stratégie originale “d’action totale”.
C’est cet homme, sa pensée et son action que raconte Jean-Marie Favière dans “Je te parle au sujet d'Édouard Vaillant”, une biographie du grand Vierzonnais documentée et détaillée, écrite de façon très vivante. Les “élites” culturelles et politiques du Cher semblant ne connaître que Jacques Cœur, George Sand et Alain Fournier, ce livre devrait les aider à découvrir un grand personnage…
Le parcours de Vaillant (Vierzon 1840 - Paris 1915) est long, il s’étend du Second Empire à la première guerre mondiale. Ingénieur des Arts et Manufactures, docteur ès sciences à la Sorbonne, docteur en médecine, Vaillant est un intellectuel et un militant d’un type particulier : à la fois penseur et homme d’action, journaliste, théoricien, organisateur, auteur de proclamations ou de manifestes.
Révolutionnaire, il choisit de participer à la Commune de Paris au printemps 1871. Délégué à l'Instruction publique. Il projette de développer l’école pour tous. Il s'attache à réorganiser les écoles primaires. Il veut instaurer la laïcité à l'école en interdisant l'enseignement religieux. Il tente aussi de promouvoir l'éducation des filles et l'enseignement professionnel.
Après l’écrasement de la Commune et la Semaine sanglante en mai 1871, il s’exile en l’Angleterre (il sera condamné à mort par contumace en juillet 1872). De retour en France après la loi d'amnistie de juillet 1880, il poursuit le combat politique aux côtés de Blanqui.
L’ancien communard est accueilli de façon triomphale à Vierzon aux cris de “Vive la Commune, vive la République !” à son retour d’exil en juillet 1880. Avec lui, Vierzon deviendra un bastion socialiste et le Cher portera longtemps la marque socialiste.
Vaillant recueille plusieurs milliers de voix aux élections municipales et crée le journal “Le Républicain socialiste du centre” en juillet 1883. Il sera conseiller municipal à Vierzon en 1884, puis député de Paris en 1893. Il crée le Comité révolutionnaire central de Vierzon (CRC) qui essaimera dans tout le département du Cher (on compte trente quatre CRC en 1898).
Toutes les grèves importantes dans le Cher sont suivies et conseillées par les militants Vaillantistes à la demande des ouvriers, porcelainiers, bûcherons, métallurgistes, carriers, ferblantiers…. Vaillant encourage la formation de chambres syndicales, de Bourses du Travail, de coopératives ouvrières de production, de consommation et de crédit. Il est à l’origine de la création de la fédération socialiste du centre, le 14 juillet 1896.
Sa contribution à l’organisation et au renforcement du mouvement ouvrier et socialiste a laissé des traces durables dans le Cher au vingtième siècle. Elle est probablement une des causes de la forte participation ouvrière à la vie politique dans notre département.
Député socialiste, Vaillant défend les libertés communales, la journée de huit heures, l'extension des assurances maladie, chômage, invalidité. Il est candidat de la SFIO à l'élection présidentielle de janvier 1913, arrivant troisième avec plus de 8 % des voix.
Républicain, laïque, socialiste et révolutionnaire, soutien de la cause du capitaine Dreyfus, artisan de l’unité socialiste au plan national, Édouard Vaillant a activement contribué à faire la République moderne. Après le centenaire de sa mort, il méritait bien un hommage de cette qualité : l’ouvrage de Jean-Marie Favière, est un livre à ne pas rater pour ceux que l’histoire locale et la “grande” histoire intéressent.
Ce premier volume aborde la période 1871-1880. L’auteur, Jean-Marie Favière, est agrégé, docteur ès lettres, professeur de français et de cinéma, enseignant jusqu'en 2009 au lycée Édouard-Vaillant de Vierzon. Ce bouquin riche et passionnant aura prochainement une suite, avec la sortie d'un deuxième tome qui sera sous-titré "Le grand socialiste”.
> “Je te parle au sujet d’Édouard Vaillant. La tête pensante de la Commune”, par Jean-Marie Favière. Un livre broché. 376 pages. Format 14 X 21 centimètres. Éditions Jean-Pierre Soumet. Prix 18,80 euros. En vente à la maison de la presse d’Henrichemont, la librairie La Poterne à Bourges et dans les bonnes librairies.