Il existe une façon malsaine de transmettre l’histoire de la Révolution Française. Depuis quelques années, dans les médias elle est calomniée, caricaturée et rendue responsable des pires crimes. Les accusations contre Robespierre par des journalistes ignorants, des politiciens et des historiens conservateurs sont nombreuses. Mais qu’on ne s’y trompe pas, en réalité, à travers Robespierre c’est la grande Révolution, fondatrice de la France moderne, qui est visée…
Par exemple, certains imputent à Robespierre les deux mille cinq cents quatre vingt cinq condamnations à mort prononcées par le tribunal révolutionnaire de Paris. Savent-ils que ce n’est pas Robespierre, mais Danton qui en a été l’initiateur ? Personne ne songe pourtant à débaptiser la rue qui porte son nom dans la capitale….
Mais, la France est en guerre (guerre civile à l’intérieur, guerre d’invasion à l’extérieur pour rétablir la royauté). Valenciennes, Longwy, Verdun, Toulon, sont occupées par les armées Prussiennes, Autrichiennes ou Britanniques. “La Patrie est en danger !” : à situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles. Pendant la Terreur où le peuple se déchaîne partout en France, voit l’ennemi partout et commet de nombreuses exactions, Robespierre tente, avec son faible pouvoir institutionnel (il n’est qu’un membre parmi tant d’autres du Comité de salut public) et son influence politique (il est membre de la Convention, animateur du club des Jacobins), de jouer le rôle de modérateur. “La vertu sans laquelle la terreur est funeste, la terreur sans laquelle la vertu est impuissante”.
Et, pourtant, grâce à l’influence de Robespierre, non seulement il n’y aura aucune censure dans la période où il participe à l’exercice du pouvoir mais il n’y aura pas non plus de justice militaire d’exception (contrairement à d’autres époques de notre histoire). Par contre, l’incorruptible demande un jugement sans pitié pour les dirigeants traîtres à la patrie.
En réalité, Robespierre est tout autre que le tyran que certains dépeignent. Il est incontestable qu’il est un pionnier de la lutte contre la peine de mort, un défenseur de l’égalité des droits et du suffrage universel, et aussi l’initiateur de la devise républicaine “Liberté, égalité, fraternité”. Il contribue à une Déclaration des droits de l'homme. Il fait voter la première loi française limitant le cumul des mandats.
Avec l'abbé Grégoire, Robespierre milite dès décembre 1789 pour obtenir l'accès des Juifs et de tous les non catholiques aux droits civils et civiques. Selon la même logique, il défend et obtient l'égalité des droits des enfants légitimes et des enfants naturels, mettant ainsi fin au calvaire civil et économique vécu par de nombreux "bâtards" sous l'Ancien régime. Il se bat également avec vigueur pour que les Noirs puissent avoir les mêmes droits que les autres citoyens – préfigurant ainsi l’abolition de l’esclavage qui sera proclamée en 1794. Il ira même au nom de l'égalité plaider pour le droit des prêtres à se marier.
De même, le culte de l’Être suprême tel que défendu par Robespierre, n’est pas une tentative d’instaurer le culte de sa personnalité (comme le prétendent les révisionnistes), mais une mesure d’apaisement dans un pays en proie à la guerre civile. L’Être suprême c’est une forme de civisme, voire de laïcité avant la lettre, dans une période d’affrontements.
La période qui voit Robespierre associé à l’exercice du pouvoir constitue la période la plus intéressante de la Révolution française (dans le sens où elle est marquée par la philosophie des Lumières et les idées de Jean-Jacques Rousseau). La Convention dirigée, suite à un vote démocratique, par les députés montagnards, permet l’arrivée du peuple dans la direction des affaires publiques. C’est bien cela que ne pardonnent pas à Robespierre les acteurs de la réaction du 9 thermidor. D’ailleurs, la chute de Robespierre, coïncide avec l'arrêt des mesures sociales qu'il avait prises en faveur des pauvres (la loi du maximum général par exemple, qui contrôlait le prix du pain et du grain). S’ils guillotinent Robespierre et ses amis sans procès, ils osent par contre faire son procès politique …après sa mort ! C’est un procès idéologique lancé par les possédants, par la bourgeoisie revancharde, qui voit dans la pensée de Robespierre, la remise en cause de leur pouvoir. Et, porté par les conservateurs de tous poils, ce mensonge va durer au long du dix neuvième siècle.…
Aujourd’hui la droite et l’extrême droite ne s’y trompent pas, elles poursuivent pour les mêmes mauvaises raisons, le procès de Robespierre (il est navrant, mais est-ce vraiment étonnant (?) qu’une frange importante du parti socialiste se joigne ces conservateurs). C’est pourquoi une partie du livre est consacrée à la critique des accusateurs les plus récents de Robespierre. En premier lieu François Furet et son obsession : “la Révolution comme matrice des totalitarismes”, Jean-François Copé et sa charge contre le 4 août, ou encore Lorant Deutsch, qui se revendique comme royaliste (au nom de quoi est-il invité dans les écoles ?).
> Petit et pas cher, “Robespierre, reviens !” est un livre pour tous ceux qui subissent ou observent, souvent désarmés, l’offensive idéologique et la propagande contre la Révolution. Défendre Robespierre et la Révolution Francaise, ce n’est pas seulement rendre justice à un grand homme, ce n’est pas seulement rétablir quelques vérités historiques, c’est une des condition pour bâtir une France tournée vers l'avenir.
> “Robespierre, reviens !” par Alexis Corbiere et Laurent Maffeis. Préface de Claude Mazauric. Éditions Bruno Leprince. Un livre broché 128 pages. Format 12 x 17 centimètres. Prix 5 euros