Les nouvelles histoires de Berlaudiot.
Paul-Antoine Grosbois, le médecin de La Charnivolle est appelé de toute urgence pour un accouchement à plusieurs kilomètres du village. Pas de chance, sa secrétaire est absente ce matin là, il va devoir fermer le cabinet. Il empoigne sa trousse de soins, sort à toute hâte, et trouve Berlaudiot sur son passage.
Tu tombes à point Berlaudiot ! Je pars pour une urgence, veux tu t’asseoir au bureau jusqu’à mon retour ? Tu diras à mes patients de m’attendre ou de revenir ce soir.
Enchanté de cette marque de confiance, garder le bureau du docteur, quel honneur ! Berlaudiot accepte et s’installe au bureau de la secrétaire.
Derrière le comptoir de son café, la Zézette Descloux apprend la chose. Comme elle n’est jamais à court d’un proverbe, elle y va de son commentaire : Est fou qui fou consulte, moué j’vous l’dis, ça va fée du joli anc’ un Berlaudiot méd’cin au village !
Les heures sonnent au clocher de l’église de La Charnivolle… Finalement le docteur Grosbois revient au cabinet.
Alors Berlaudiot, comment s’est passée la journée ?
- Y a eu que trois malades, docteur.
Et alors ? Ils sont partis ? Ils m’ont attendu ?
- Bin, l’premier c’était rapoilu, j’veux dire Émile Turpin, l’boucher, il a dit qu’il avait la lordenne, tel’ment qu’ça y résonnait dans l’çarviau. Il’tait si mal que j’y ai donné deux paracétamol d’un coup. Mais j’y ai dit qu’pour les papiers faura qu’y r’vienne.
Très bien, Berlaudiot, dit Paul-Antoine, et l’autre ?
- Çui qu’est m’nu après, c’était l’nainain, vous savez bin, Pierrot Chamaillard le cantonnier.
Et alors ? Il est parti ? Il m’a attendu ?
- Bin non docteur. Nainain il avait des brûlûr’ d’estouma tel’ment brûlantes et pi acides qu’ça y r’montait dans l’garganiot et qu’ça y f’sait des lancées à s’tordre. Alors ça m’a fait pitié et j’y ai donné deux Mallox d’un coup. Et pi j’y ai dit qu’pour les papiers faura qu’y r’vienne.
De mieux en mieux Berlaudiot, je crois que je ferai encore appel à toi… Et le troisième ?
- Ah là c’était pu pareil docteur, une vraie sorcière en folie al’ a d’mandé à vous causer. C’était Julie Chevreau, la Papète, celle là qu’a d’meure en forêt, au carroir du marlou.
“J’en peux pu, j’en peux pu qu’à criait en riboulant des eil coum’une chavoche. Ça fait troués ans qu’j’on pas vu un houm’ ! Troués ans qu’j’on pas vu un houm’ ! Dame à s’plaignait tel’ment qu’les grumes à lui tombaient d’l’eil ! Pi al’a enl’vé tous ses afutiaux, l’devant, l’darriére et pi l’dessous et pi a s’est couchée su’ l’bureau. Coum’ ça, nue comme un ver ! Et pi a m’a montré ses nanounnes et pi tous ses estouma’ en répétant “troués ans qu’j’on pas vu un houm” !
Eh bien, Berlaudiot, quelle histoire ! Et qu’as tu fait alors ?
- Bin j’y ai mis trois goutt’ dans les deux eil et pi j’y ai dit qu’pour les papiers faura qu’a r’vienne….
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