Avec le lobbying, la triche est devenue une méthode de gestion des entreprises… Il y a eu l’annonce des tricheries de Volkswagen sur les moteurs diésel, puis celle de Renault. Maintenant, ce sont les trucages de Monsanto que la justice fédérale américaine a rendu publics jeudi 16 mars. Plus de 250 pages de documents internes du fabricant du glyphosate (et d’autres saloperies comme l’agent orange)….
En effet, Monsanto savait dès 1999, que le glyphosate, composant principal de son produit phare, le Roundup, était mutagène, c’est à dire capable d’engendrer des mutations génétiques ! Le glyphosate est aussi la molécule phytosanitaire pesticide (c’est à dire un poison) la plus utilisée au monde.
Or le 15 mars, la veille de la publication de ces informations, l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA) annonçait qu’à ses yeux le glyphosate n’est pas cancérogène ni mutagène.
Réaction hypocrite de l’Association européenne des fabricants de pesticides, (ECPA) le lobby qui réunit Monsanto, Bayer, Dow, BASF, Syngenta, avec cette déclaration : “La science l’a emporté”. Une petite phrase qu’il faut inscrire dans les anales !
Avant cela la Commission européenne s'appuyait sur l'avis de l'Agence européenne de sécurité des aliments (EFSA), qui déclarait en novembre 2015 “qu’il est improbable que le glyphosate soit génotoxique (c’est-à-dire qu’il endommage l’ADN) ou qu’il constitue une menace cancérogène pour l’homme”.
De deux choses l’une : ou les “experts” et technocrates Européens sont incompétents, ou ils sont les complices corrompus du lobby du glyphosate et des industriels de l’agrochimie.
Et voilà la Commission Européenne au pied du mur, car une décision devra être prise “dans les six mois" par le comité scientifique présidé par la Commission, et qu’elle comptait sur l’avis de l’ECHA. Un avis qui a, on s’en doute, provoqué les réactions indignées de nombreuses associations de défense de l’environnement qui accusent le comité d'avoir écarté les études négatives sur le glyphosate. Comme celle du Centre international de recherche contre le cancer (CIRC), une branche de l'OMS, qui avait évalué le risque cancérogène comme “probable”.
De son côté, Greenpeace a déclaré : ”Pour arriver à ses conclusions, l'ECHA a rejeté des preuves scientifiques flagrantes de cancers chez des animaux de laboratoire, passant outre les avertissements de plus de 90 scientifiques indépendants, et se basant sur des études non publiques commandées par des producteurs de glyphosate”.
Dans un communiqué commun, la Ligue contre le cancer, Générations futures et Foodwatch déclarent : “Une substance ne devrait être autorisée que s’il n’existe aucun doute sérieux sur son innocuité. Ce n’est pas le cas pour le glyphosate, l’Union européenne doit donc l’interdire. L’Union européenne doit mettre fin à l’autorisation du glyphosate en Europe”.
Et Générations Futures insiste en ces mots : "Cette classification de l’ECHA est totalement incompréhensible car le Centre international de recherches contre le cancer (CIRC) a montré clairement qu’au moins sept études mettent en évidence une incidence accrue de certains cancers chez des animaux de laboratoires exposés au glyphosate".
La ministre française de l'Environnement Ségolène Royal ne pouvait pas faire moins et "a condamné la décision" de l'ECHA, appelant les gouvernements européens "à continuer à s’opposer" au renouvellement de l'autorisation du glyphosate.
Mais laissons la Commission Européenne se débattre pour se laver des soupçons de complicité avec les lobbys et revenons pour finir à la révélation du scandale Monsanto repris par des journaux étatsuniens.
En effet, c’est en 1999, Monsanto décide de faire appel à une “pointure” scientifique pour convaincre l’Europe que le glyphosate n’est pas génotoxique. Les messages échangés par des cadres de l’entreprise ne laissent aucun doute sur leur connaissance de la nocivité de leur produit et des fausses preuves qu’ils veulent fabriquer avec le concours de James Parry, professeur à l’université de Swansea (Pays de Galles) et spécialiste de la génotoxicité. Malheureusement pour eux, Parry ne joue pas le jeu et conclut rapidement au danger réel du principe actif du Roundup, le glyphosate.
Réaction d’un des toxicologues de Monsanto qui écrit à ses collègues : "Parry n’est pas la personne qu’il nous faut et cela prendrait pas mal de temps, de dollars et d’études pour l’amener à l’être (…) Nous n’allons simplement pas conduire les études qu’il suggère". Et il ajoute à propos de la génotoxicité du glyphosate : “Nous sommes actuellement très vulnérables". (Pour lire le texte intégral de l’article et les messages de Monsanto, cliquez sur les liens en bas de page).
En Europe, la révélation des documents de Monsanto fait grand bruit. Des députés du parlement Européen y voient une preuve supplémentaire que certaines agences européennes “sont aux mains de lobbys“. “Il est clair maintenant qu’il y a quelque chose de pourri dans le royaume de certaines agences européennes : conflits d’intérêts, absence totale d’indépendance et de transparence. Ce n’est pas acceptable” déclarent des eurodéputés socialistes qui demandent le démantèlement et une reconstruction “de A à Z de l’Agence européenne des produits chimiques”.
On attend la réaction de la Commission Européenne. Décidera-t-elle de nettoyer les écuries d’Augias ? Ou s’avouera-t-elle complice de Monsanto, du lobby des industriels de l’agrochimie (et des autres) ?
> Sources. Le Monde Planète. Ce que les “Monsanto Papers” révèlent du Roundup. >>> Lien.
The New-York Times. Monsanto Weed Killer Roundup Faces New Doubts on Safety in Unsealed Documents. >>> Lien.
Bloomberg. EPA Official Accused of Helping Monsanto ‘Kill’ Cancer Study. >>> Lien.
Sciences et Avenir. Une étude européenne écarte le risque cancérogène du glyphosate. >>> Lien.
Euro journalist. Ces lobbys qui tuent l’Europe. >>> Lien.