On la nomme encore maison de la culture, mais depuis que, il y a bien longtemps, Gabriel Monnet a été viré par le maire de Bourges pour son indépendance d'esprit et son ambition culturelle, la scène nationale de la place Séraucourt (au delà de son architecture), a peu de choses à voir avec ses origines.
Le véritable statut de ce que les berruyers appellent encore MCB (pour combien de temps ?), n'est plus celui d'une maison de la culture dirigée par un directeur-homme de théâtre et une association de spectateurs, car en 2010 l'association qui administrait la MCB a été remplacée (non sans heurts) par un EPCC (Établissement public de coopération culturelle - chapeauté par l'administration) avec le label scène nationale.
Adieu l'indépendance, la liberté de création pour une culture émancipatrice.... La scène nationale de Séraucourt a pris la suite.
Et comme la municipalité de Bourges n’a pas défini de politique culturelle et n’en n’a jamais débattu avec les citoyens, c’est une autre instance qui en décide : le ministère de la culture.
Comme les autres scènes nationales, les activités de celle de Bourges s’organisent autour d’un bloc de missions définies par le ministère de la Culture (attention au charabia technocratique) : c’est à dire une responsabilité d’entraînement, d’animation et de références pour le paysage de la création et de la diffusion artistique qui l’environne. Elle porte une considération permanente à son territoire et à sa population, dans toutes leurs composantes particulières…
C’est le 16 décembre 1991 que Bernard Faivre d’Arcier, directeur du Théâtre et des Spectacles au Ministère de la Culture, en a défini les contours dans un langage qui évacue le rôle libérateur de la culture. De nos jours, l’État a pris la main, le caractère étatique du projet montre la rupture avec la décentralisation culturelle et les Centres dramatiques nationaux, le TNP de Jean Vilar, puis le projet d’André Malraux. Pour ceux qui en douteraient encore, je les engage à lire ce qui est écrit dans la page de l’association des scènes nationales : >>> Lien.
Bien sûr, la plupart des spectacles de la scène nationale de Séraucourt sont de qualité, choisis parmi un ensemble de productions à la valeur artistique confirmée, ce n’est pas contestable.
Mais écoutons Olivier Atlan interrogé par Toute La Culture le 7 septembre 2021 : “Nous sommes une maison de la culture avec des missions qui sont celles d’une scène nationale” et il précise : “Auparavant, dans la Maison de la culture de Bourges, il y avait tout : bibliothèque, vidéothèque, arts plastiques, spectacles.”
On pourrait ajouter : il y avait aussi une troupe de théâtre, de la chanson, des expositions, un journal, des soirées cabaret, un lien vivant avec le public…
Mais avec la scène nationale, tout ça n’existe plus. À quoi bon l’appeler maison de la culture ?
Il y a quelques années, une grande enseigne de distribution du livre et du disque avait pris pour slogan celui d’agitateur culturel. On aimerait que Bourges renoue avec le joyeux bouillonnement artistique et culturel, les liens noués avec la jeunesse et la population berruyère, animés par Gabriel Monnet, et qui méritaient mieux cet adjectif d’agitateur culturel.
Et ça avait une autre gueule, on en conviendra.
Il faudra bien que revienne un jour une vraie maison de la culture à Bourges.
> Lire La belle saison, Gabriel Monnet, le livre édité par Double Cœur qui témoigne de cette grande époque.
> Voir “Ne pas confondre culture et Cultura”, page de gilblog en 2014. >>> Lien.
Carte des scènes nationales en France. >>> Lien.
Association des scènes nationales : >>> Lien.