C’est une soirée un peu exceptionnelle que Double Cœur offrira le 23 février. “Lettres à Nour” a déjà été représenté au Festival d’Avignon en 2017, au Théâtre Antoine en 2018 avec Charles Berling et Lou de Laâge, au Théâtre des Bouffes du Nord avec l’auteur Rachid Benzine, et en tournée dans de nombreuses villes de province avec Robin Renucci et Lou de Laâge, Éric Cantona et Nacima Bekhtaoui.
Et si c'était un texte qui éclairait au mieux le drame djihadiste de ce début de XXIème siècle ? écrit le journal La Croix?
En effet, cette lecture spectacle traite d’une des pires questions de notre époque : comment et pourquoi des croyants peuvent-ils disposer des autres et les tuer s’ils ne se rallient pas à leur foi ?
Nour signifie Lumière en arabe. Elle est partie en cachette, rejoindre en Irak un homme qu’elle a épousé, ne le connaissant que sur Internet, un lieutenant de Daech. Elle écrit à son père, universitaire veuf et qui pratique un Islam bienveillant, mettant la vie au-dessus de la foi.
“Lettres à Nour” est un dialogue entre deux êtres qui ne peuvent renoncer l’un à l’autre, un père et sa fille, parce que l’amour qui les unit reste plus fort que tout. Et pourtant, tout les sépare. L’esprit critique du père est retourné contre lui : les principes auxquels il croyait sont devenus des armes aux mains de sa fille. L’impuissance de deux êtres si proches, si complices, à établir un dialogue, à trouver une entente, un point d’accord, est la brûlure qui traverse ce texte. A la fois intimes et politiques, les “Lettres à Nour” font apparaître la parole insidieuse de Daech, la fragilité de la démocratie et de la tolérance, l’amour inconditionnel d’un père et de sa fille. Au-delà de l'incompréhension, cette correspondance porte un message d'espoir, celui de la réconciliation des générations futures. Au-delà des croyances, elle révèle que seule la vie est sacrée. C’est une véritable leçon d'amour, d'ouverture des consciences où l'on peut et l'on doit s'aimer malgré nos différences.
“J’ai réalisé la fragilité de nos certitudes, la fragilité de notre monde, les limites de notre raison. Et, surtout, j’ai ressenti l’absence de rencontre, d’échange, entre ces deux mondes qui se font face dorénavant et que j’aurai bien du mal à nommer : “civilisation contre barbarie ? raison contre religion ? modernité contre archaïsme ?”, écrit Rachid Benzine.
Islamologue et chercheur franco-marocain, auteur de nombreux livres, essais et romans, Rachid Benzine fait partie de la nouvelle génération d’intellectuels qui prône un travail critique et ouvert sur le Coran. Partisan de l'islam des Lumières, il prône une lecture “plus philosophique et allégorique” du Coran.
Mercredi 23 février à l’amphithéâtre des Archives départementales du Cher, les acteurs Joséphine Serre et Xavier Bazin, accompagnés au piano par Véronique Briel, étaient les interprètes sensibles et talentueux de l’œuvre de Rachid Benzine. Leur jeu émouvant mais plein de retenue, au service de ce beau texte, a touché le public en plein cœur. Des applaudissements longs et nourris ont salué ce spectacle digne d’une maison de la culture.
> “Lettres à Nour” de Rachid Benzine. Une lecture spectacle présentée par Double Cœur et le Théâtre Avaricum. Mercredi 23 février à 19 heures. Amphithéâtre des Archives départementales du Cher. Rue Heurtault de Lammerville. Entrée libre. Réservation obligatoire 02 48 21 04 71 ou double.cœur@orange.fr