Les recherches généalogiques sont pleines de surprises, bonnes et mauvaises (aïeux inattendus, archives disparues…), mais ça n’entame pas la détermination des opiniâtres découvreurs d’ancêtres. C’est ainsi que, grâce à son frère Jean-Paul qui en était déjà à son deuxième livre sur les ascendants familiaux (!), Nicole Robinet, Henrichemontaise depuis trente ans, a découvert un parent qui est un personnage historique. Et pas des moindres, puisque son ancêtre Gabriel Ranvier est l’homme qui a proclamé la Commune de Paris en 1871 !
Dans son troisième livre, intitulé “Gabriel Ranvier 1828-1879 Histoire de famille” Jean-Paul Robinet situe son aïeul dans son siècle et notamment pendant la Commune, ce qui donne des pages d’histoire très documentées et abondamment illustrées de gravures et photos d’époque. Cet album “familial” est en réalité un livre d’histoire de haute qualité éditoriale. Une souscription est ouverte en vue de le rééditer.
Mais parlons un peu d’histoire et de Ranvier…
Après la défaite militaire de 1870 contre la Prusse, Napoléon III ne dirige plus la pays, le gouvernement qui vient de quitter Paris pour Versailles, se soumet aux Prussiens et décide de désarmer les Parisiens. Le gouvernement de Thiers veut leur soustraire les deux cents vingt sept canons installés à Belleville et à Montmartre pour défendre Paris. Canons que les parisiens considèrent comme leur propriété puisqu'ils les ont eux-mêmes payés par souscription pour se battre contre la Prusse ! Les parisiens se sentent menacés et se voient sans défense contre les Prussiens qui veulent entrer dans la capitale, ou pour parer à d’éventuelles attaques des troupes gouvernementales. Se sentant trahie la population, s'oppose aux soldats venus chercher les canons, elle élève des barricades, fraternise avec la troupe, et s'en prend aux représentants du gouvernement… C’est l’insurrection. Apprenant les événements, Victor Hugo écrit dans son journal : “Thiers, en voulant reprendre les canons de Belleville, a été fin là où il fallait être profond. Il a jeté l’étincelle sur la poudrière”.
La Commune de Paris est partie d’une réaction à la défaite française de la guerre franco-prussienne de 1870 et au siège de Paris. Elle va ébaucher pour la ville une organisation proche de l’autogestion, imprégnée des idées socialistes de l’époque. Certains voient dans ce refus de la défaite et de la trahison du gouvernement, une préfiguration de la résistance contre l’invasion de la France par les armées allemandes et la trahison du gouvernement du Maréchal Pétain. On ne peut éviter de faire le parallèle historique…
Gabriel Ranvier, nait le 8 juillet 1828 à Baugy, il est le troisième enfant du cordonnier du village Paul Ranvier, lui même fils de cordonnier. Gabriel apprend le métier d’ouvrier décorateur sur laque à Paris et crée son entreprise artisanale. Blanquiste, franc-maçon, membre de l’Internationale, figure socialiste connue dans le quartier de Belleville, il est candidat socialiste aux élections législatives du 8 février 1871. Membre du Comité central de la Garde nationale, il est élu du vingtième arrondissement de Paris et maire de cet arrondissement, et membre du Comité de salut public.
Donc, le 26 mars Ranvier est élu de la Commune dans le vingtième arrondissement. Le 28 mars 1871, deux cent mille parisiens vont à l’Hôtel de Ville pour installer leurs nouveaux élus. Les chants éclatent, les musiques jouent la Marseillaise et le Chant du Départ, les clairons sonnent. Gabriel Ranvier proclame la Commune : “Au nom du peuple, la Commune est proclamée ! Citoyens, j’ai le cœur trop plein de joie pour prononcer un discours. Permettez-moi seulement de glorifier le peuple de Paris pour le grand exemple qu’il vient de donner au monde”.
Les semaines qui suivent, Ranvier participe à l’œuvre sociale et politique de la Commune. La Commune ordonne la séparation de l'Église et de l'État, instituant la laïcité avec trente quatre ans d’avance sur la future loi. Elle crée l’enseignement obligatoire, laïque et gratuit avec intégration de l'instruction professionnelle. Elle crée les futures Bourses du travail. Elle remet les fabriques abandonnées à des coopératives ouvrières. Elle lutte contre la hausse des prix, contrôle le prix du pain, de la viande de boucherie, des haricots, légumes, beurres, café, vins etc. Malgré le siège, la Commune assure le ravitaillement de la capitale, le secours aux indigents, la sauvegarde de la santé, la sécurité et la justice, la levée et la distribution du courrier, l’ouverture au public des musées et des bibliothèques, le fonctionnement des services des Monnaies et médailles, de l’Imprimerie nationale, des Poids et mesures, la collecte des impôts et taxes nécessaires au fonctionnement de ces services, au paiement de la solde des gardes nationaux.…
Durant ces semaines d’activité fiévreuse, Ranvier côtoie d’autres communards berrichons qu’il serait injuste de ne pas citer : Édouard Vaillant, Félix Pyat, Charles-Ferdinand Gambon…
Mais l’armée de Versailles pénètre dans Paris le 21 mai. Pendant toute une semaine elle refoule peu à peu les forces de la Commune vers l’est de la capitale. Ranvier, montre une énergie superbe dans les batailles. “Il fut, dit Lissagaray, pendant cette agonie, l’âme de la Villette et de Belleville, poussant les hommes, veillant à tout”.
Gabriel Ranvier réussit à échapper à la cruelle répression versaillaise de la “semaine sanglante” plus efficace contre les parisiens que contre les soldats Prussiens (plus de quinze mille morts selon Lissagaray) et à fuir à Londres. Là, il trouve un travail de peintre sur porcelaine. Après huit ans d’exil, il meurt épuisé par ses luttes et la maladie, un mois après son retour à Paris en 1879.
Au siècle dernier, le romancier Jean-Pierre Chabrol en fait une des grandes figures de son livre “Le Canon fraternité”, une manière de lui rendre justice.
Enfin, en février 2014, à l’initiative des Amis berrichons de la Commune de Paris, la municipalité de Baugy a créé et inauguré un espace public “Gabriel Ranvier” en présence de ses descendants et de membres de l’association. “J’espère qu’on y plantera bientôt un cerisier, ça rappellerait ‘le temps des cerises’ écrit au lendemain de la Commune, et ce serait un beau symbole” commente Nicole Robinet.
> Devant la qualité du travail éditorial réalisé, et en accord avec Jean-Paul Robinet, l’Association des Amis Berrichons de la Commune de Paris 1871 a décidé rééditer en souscription son livre. On pouvait consulter l’ouvrage au Salon du Livre d’Henrichemont le 19 novembre dernier.
> Pour en savoir plus sur Gabriel Ranvier, lisez la page du Cercle Généalogique du Haut Berry : “Gabriel Ranvier Communard Berrichon” par Jean Morichon. >>> Lien.
Lire aussi dans Wikipedia : Commune de Paris (1871). >>> Lien.
> “Gabriel Ranvier 1828-1879 Histoire de famille” par Jean-Paul Robinet. Pour la souscription, pas de paiement pour l'instant, mais l’adresse postale du demandeur est nécessaire. Adressez vos demandes à l’Association des Amis Berrichons de la Commune de Paris 1871. 15, avenue Louis Billant. 18800 Villabon. Courriel : nicmic.villab@wanadoo.fr