"Personne ne peut garantir qu'il n'y aura jamais un accident grave en France", admettait André-Claude Lacoste (patron de l'Autorité de sûreté nucléaire française), après la catastrophe de Fukushima du 11 mars 2011. Il nous faut "imaginer l'inimaginable", ajoutait Jacques Repussard (directeur de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire). Les autorités censées rassurer les français, ne se montrent guère rassurantes...
Enfin, tout de même, des structures d'information des citoyens existent, on dira que c'est le minimum ...minimorum. Les Commissions locales d'information (CLI) sont des structures d'information et de concertation obligatoirement mises en place pour certaines "installations classées pour la protection de l'environnement" (ICPE). Il y a actuellement en France trente huit Commissions locales d'information autour des sites nucléaires ICPE. Elles sont constituées d'élus (pour Belleville des communes avoisinante : Loiret, Nièvre, Cher), de syndicalistes, de représentants d'associations (comme Nature 18), d'experts ou de "personnes qualifiées".
Comme les autres Commissions, la CLI de la centrale de Belleville sur Loire a une mission générale d'information du public en matière de sûreté et de suivi de l'impact des activités sur les personnes et l'environnement. Dans le domaine du nucléaire, elle est régie par la loi du 13 juin 2006 relative à la transparence et à la sécurité. La CLI de Belleville est dite "compétente" en matière d'information, de santé et de sécurité des riverains (par exemple les retombées sur les habitants, l'agriculture, l'eau, l'environnement). Son travail vise à minimiser les risques relatifs à cette installation nucléaire (y compris en cas d'accident), par une meilleure information des riverains notamment.
> La CLI Belleville est présidée par Bernard Buffet (adjoint au maire de Boulleret), on note la participation de François Goulain, actuel directeur de la centrale EdF. Dans ces réunions, on présente depuis 2011 le bilan administratif (la CLI est une association) et le bilan de l'exercice industriel. Parfois, un exposé spécifique est présenté aux participants.
> C'est ainsi que le 20 septembre à Savigny en Sancerre, ont été abordés les dysfonctionnements de gestion technique sur le site de Belleville. EdF les a justifiés en déclarant que tout ceci était dû au "turn over" très important des personnels… Jean-Pierre Thyrion (président de Nature 18), est intervenu pour exprimer son désaccord. Il a rappelé à EdF qu’un "donneur d’ordre" est responsable de son entreprise et des sous-traitants qui travaillent pour cette entreprise, qu’il doit s’assurer des qualifications des personnels, de la formation de ces derniers et du maintien du niveau de compétences. Sur le plan légal, seul le "donneur d’ordre" est connu et assume toutes les conséquences si son sous traitant est défaillant. En conséquence, la réponse d'EdF n'est pas un argument. Et il ajoute qu'une telle attitude est particulièrement grave et inquiétante de la part d’une entreprise du nucléaire.
> Autre sujet abordé, les rejets de tritium. Le tritium est produit dans toute réaction nucléaire, c'est dit on, l’élément produit le plus faiblement radiotoxique. Il a une courte durée de vie (12,3 années pour la demi-vie). Mais il est produit en continu et les rejets gazeux retombent autour de la centrale et contaminent l’herbe et les végétaux. Cet impact, n’est pas satisfaisant, aussi EdF serait en train de transformer ses installations pour dissoudre dans l’eau le "tritium gazeux" (HT) qui devient ainsi du HTO, c'est-à-dire de l’eau "tritée" que la centrale rejette à la Loire et qui se disperse dans l’eau. Ainsi les taux relevés sur les végétaux autour de la centrale diminueront "de manière significative" a entendu Jean-Pierre Thyrion… Et, miracle, selon EdF, il n’y aurait aucun impact sur le milieu aquatique ! Mais EdF ne dit pas comment est mesurée cette "absence" d'impact.
> Des riverains de la centrale atteints de la maladie de Hashimoto. Une personne intervient pendant une réunion de la CLI en juin 2010 et montre un dossier en provenance de l’hôpital Cochin. Ce dossier évoquerait des maladies touchant des habitants proches des centrales et plus particulièrement de Belleville. Il s’agit de la maladie de "Hashimoto", de maladies "auto immunes" ...etc. Ces maladies seraient dues à la présence de "Iode 131" et de "Tritium". Le docteur Bernard Le Guen (médecin EdF) déclare ne pas être informé de tels problèmes... Espérons qu'il aura interrogé ses collègues de l'hôpital Cochin d'ici la prochaine réunion de la CLI (on aimerait être rassurés).
> Dans un rapport plutôt critique de douze pages du 13 juillet 2013, l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), suite à son inspection d'octobre 2012, met EdF en demeure de régulariser la situation à la centrale de Belleville (rapport présenté à la réunion du vendredi 20 septembre 2013 à Savigny en Sancerre). Il s'agit de l'entreposage des déchets, d'un inventaire défaillant et d'autres manquements à la réglementation. Heureusement (si l'on peut dire), il s'agit de déchets potentiellement pathogènes (légionelles, amibes), pas de déchets radioactifs. L'Asn reproche également à la centrale d'avoir déversé accidentellement des effluents tritiés (à faible radioactivité ?) sur la chaussée, et des rejets d'hydrocarbures. Et aussi, les revues de conformité des installations font remarquer un manque de rigueur dans l'exploitation des installations et dans le stockage des conteneurs d'outillage potentiellement contaminé. Ici c'est très résumé, mais le document est plus détaillé....
En lisant ce rapport, François Goulain devait être dans ses petits souliers...
> La CLI, c'est aussi une communication anémique et d'un accès compliqué. Sur le site web de la CLI, les pages où l'on espère voir le compte rendu des Assemblées générales, sont assez difficiles à trouver, il faut aller à la rubrique "Présentation de la CLI". Et si on appelait les choses par leur nom, comme "comptes rendus des réunions" ? De plus, le lien pour accéder au texte est situé tout en bas de page et en très petits caractères. Il existe aussi un bulletin nommé "CLI mag", mais on ne sait où se le procurer. Dans son rapport remis à la CLI et au Coderst, L'ASN annonçait une consultation du public le 26 août 2013 pour une durée de quinze jours, ce qui est un peu court on en conviendra. Une consultation, vous étiez au courant, vous ? Le constat est que, dans de telles conditions, le citoyen lampda n'accède pas facilement à l'information. En somme une communication publique empreinte de ...discrétion !
> Selon les médias qui s'informent auprès des milieux bien informés, le gouvernement s’apprête à décider l'allongement de la durée de vie des centrales nucléaires françaises jusqu’à cinquante ans. Alors que plusieurs centrales ont déjà atteint trente ans (durée de fonctionnement pour laquelle elles avaient été conçues), certaines parties des réacteurs (cuves, enceintes de confinement, câbles inaccessibles…) vieillissent et ne peuvent pas être remplacées. La première unité de Belleville, mise en service en 1987 atteindra la limite d'âge en 2017, son exploitation serait donc prolongée jusqu'en 2037. À Belleville comme ailleurs, nous voila placés devant l'augmentation des risques d'accidents liés au vieillissement du matériel.
Pendant ce temps, la langue de bois règne pour parler du nucléaire, signe que les autorités nous prennent pour des berlaudiots. Par exemple la catastrophe de Fukushima est classée sur une échelle des "événements" nucléaires. Ou encore, ce trucage malhonête mais hilarant : la promotion de l'électricité nucléaire est baptisée "énergie verte" !!!
Le nucléaire, une "énergie verte", on se quittera sur ces mots !
> Pour en savoir plus :
Site web de la CLI de Belleville sur Loire. >>> Lien.
Présentation de la Cli (il faut cliquer sur Les Assemblées générales). >>> Lien.
Association pour le contrôle de la radioactivité. >>> Lien.
Association pour le Contrôle de la Radioactivité de l'Ouest (ACRO). >>> Lien.
Radiotoxicité du tritium. Wikipedia. >>> Lien.